Légende pour la notation des films

Bienvenue dans mon univers filmique ! Ma mission ? (Re)voir tous mes films, séries Tv, documentaires et concert, tous genres confondus, sur tous supports, Vhs, Dvd, Dvd-r, Blu-ray (avec aussi les diffusions télévisées ou cinéma), et vous donner mon avis de façon simple et pas prise de tête sur chaque titre (re)vu ! C'est parti !



AVERTISSEMENT : Certaines bandes-annonces ou extraits de films peuvent heurter la sensibilité du jeune public.




dimanche 30 juin 2024

LA ZONE D'INTERÊT

 

LA ZONE D'INTERÊT
(The Zone of Interest)


Réalisateur : Jonathan Glazer
Année : 2023
Scénariste Jonathan Glazer
Pays : USA, Angleterre, Pologne
Genre : Drame, Guerre, Historique
Interdiction : /
Avec : Christian Friedel, Sandra Hüller, Johann Karthaus, Luis Noah Witte...


L'HISTOIRE Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, et sa femme Hedwig s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin à côté du camp...

MON AVIS : Venant de l'univers du clip-vidéo, Jonathan Glazer, hormis quelques courts-métrages, n'est passé que quatre fois derrière la caméra en tant que réalisateur d'un long-métrage. On lui doit Sexy Beast en 2000, Birth en 2004, Under the Skin en 2013 et La Zone d'intérêt en 2023. Le titre même de ce dernier film évoque le nom donné par les nazis à la zone de 40 kilomètres carré entourant le tristement célèbre camp d'Auschwitz. C'est également le titre d'un roman de Martin Amis dont s'est inspiré librement le réalisateur. Glazer a passé plus de trois ans à préparer le tournage du film, avec un seul objectif en tête : ne pas esthétiser les images, pour se rapprocher le plus possible de la réalité. Le tournage s'est déroulé sur le sol polonais, pas très loin d'Auschwitz. La maison des Höss a été reconstruite, de même que le jardin tant aimé par la femme du commandant du camp. Si le roman se déroule à l'extérieur mais aussi à l'intérieur du camp, Jonathan Glazer a décidé de ne tourner qu'à l'extérieur, tout en effectuant un incroyable travail sonore pour faire ressentir au spectateur les horreurs qui se déroule à l'intérieur. Un parti-pris payant, qui apporte un terrifiant contraste entre la vie calme et paisible des Höss dans leur maison, qui était située le long du camp, et les atrocités commises au sein du plus grand camp d'extermination nazi. Autre point intéressant, le film est présenté du point de vu nazi, et non de celui des victimes. Logique quand le sujet même de La Zone d'Intérêt est la déshumanisation. Rudolf Höss est célèbre pour avoir été le commandant du camp d'Auschwitz mais aussi pour avoir été un employé modèle, totalement investi, tel un bon travailleur, dans la mission que lui a confié les hautes instances nazies. Il n'est pas né monstre, et le plus terrifiant est qu'il n'a pas l'impression d'en être un lors de la guerre. Il est juste un militaire qui obéit aux ordres et met tout en oeuvre pour satisfaire son supérieur. On ne faisait qu'obéir aux ordres est une phrase qui revenait souvent dans la bouche des officiers et soldats nazis à la fin de la guerre. Comment une personne peut-elle arriver à afficher un tel détachement dans sa vie quand, à quelques pas de son jardin, des milliers de personnes sont assassinés ? Comment sa moralité n'est-elle pas affectée ? C'est ce qui fait de La Zone d'Intérêt un film assez difficile d'accès de prime abord. Il n'y a aucune scène choc, aucun suspense, aucune scène d'action. Le réalisateur filme la banalité. Une balade au bord d'une rivière, l'anniversaire du commandant du camp, les enfants qui jouent, le retour du commandant après sa journée de travail, le personnel de maison qui s'affaire aux tâches domestiques par exemple. Rien de bien palpitant à l'écran. En fait, La Zone d'Intérêt fait dans le 2 films en un. On navigue entre la vie d'une banalité totale, voire même ennuyante, de la famille Höss représentée visuellement à l'écran et les horreurs commises au sein d'Auschwitz qui, elles, sont représentées à l'écran de manière auditive. Si le film a obtenu l'Oscar du meilleur son, ce n'est pas pour rien. Tirs de balle, voix des officiers malmenant les prisonniers, cris de ces derniers, pleurs de femmes et de bébés viennent nous rappeler constamment qu'on n'assiste pas à une simple partie de campagne ou à une simple tranche de vie dans une famille allemande. Que l'horreur, certes toujours en hors-champ, est bien présente. Et que ce travail sur le son fait que notre esprit crée les images non vues. Les dialogues participent également à ce contraste entre visuel et sonorité. Quand Rudolf Höss, qui fait trop bien son travail, est sollicité par les chefs nazis pour aller s'occuper de la supervision de tous les autres camps et qu'il doit donc être muté, le personnage de sa femme Hedwig, relégué au second plan auparavant, passe au premier plan et le réalisateur s'attarde alors sur la déshumanisation de la femme du commandant d'Auschwitz. Une déshumanisation peut-être encore plus extrême que celle de son mari et qui prend sens lors de deux dialogues en particulier : celui où elle dit à une servante - une prisonnière - qu'elle pourrait demander à mon mari de répandre tes cendres dans les champs de Babice ou celui, assez hallucinant, où elle n'accepte pas la mutation de son mari et lui annonce qu'elle restera ici, avec leurs enfants dans sa belle maison d'Auschwitz, qui représente tout ce qu'elle désire. Qui représente son Paradis à elle. Un Paradis pourtant situé à quelques mètres de l'Enfer. Un Enfer que la famille Höss a réussi à effacer de son champ de vision, de sa moralité, de sa perception. Une vie bucolique et sereine est-elle possible à côté de l'Enfer ? Les Höss en ont fait une réalité. Grâce à une habile mise en scène, toute en retenue, mais qui a nécessité un très gros travail de préparation, avec mêmes des caméras cachées dans les décors, Jonathan Glazer nous fait toucher du doigt la banalité du Mal et nous interroge. Peut-on s'habituer à tout ? Les images contemporaines vers la fin du film, de femmes faisant le ménage dans le musée d'Auschwitz, lavant les glaces des vitrines où sont entreposés des milliers de chaussures, lunettes et autres objets, balayant le sol des fours crématoires, sont très intéressantes à ce niveau. Film contemplatif à l'extrême, déstabilisant de par son absence totale de rythme, et proposant une vision atypique et original sur la Shoah, La Zone d'Intérêt provoque une réflexion et nous ramène à l'actualité contemporaine, où les images de la guerre ont fait leur retour sur nos écrans de télévision, sans qu'elles viennent réellement perturber nos habitudes. 

* Disponible en DVD, Blu-Ray et combo UHD+Blu-Ray le 5 juillet 2024 chez BLAQ OUT
Bonus :
-> Entretien avec Antoine Desrues, critique de cinéma (32 min)
-> Secrets de tournages (7 min)
-> Making of (30 min – éditions Blu-Ray et combo UHD+Blu-Ray uniquement)










Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire