Légende pour la notation des films

Bienvenue dans mon univers filmique ! Ma mission ? (Re)voir tous mes films, séries Tv, documentaires et concert, tous genres confondus, sur tous supports, Vhs, Dvd, Dvd-r, Blu-ray (avec aussi les diffusions télévisées ou cinéma), et vous donner mon avis de façon simple et pas prise de tête sur chaque titre (re)vu ! C'est parti !



AVERTISSEMENT : Certaines bandes-annonces ou extraits de films peuvent heurter la sensibilité du jeune public.




dimanche 30 juin 2019

SCHLOCK

SCHLOCK
(Schlock)

Réalisateur : John Landis
Année : 1973
Scénariste : John Landis
Pays : Etats-Unis
Genre : Comédie, Fantastique
Interdiction : /
Avec : John Landis, Saul Kahan, Joseph Piantadosi, Richard Gillis...


L'HISTOIRE : Depuis trois semaines, la ville de Canyon Valley est le théâtre d’une série de meurtres sanglants. Surnommé le « tueur à la banane », le dangereux criminel est en réalité un gorille âgé de vingt millions d’années, le Schlockthropus. Pourchassé par la police, Schlock va découvrir l’amour en la personne de Mindy, une jeune aveugle qui le prend pour un chien…

MON AVIS : C'est en voyant au cinéma Le Septième Voyage de Sinbad à l'âge de huit ans que le petit John Landis décide de son futur : il sera réalisateur de films ! Après avoir travaillé sur divers postes au sein de l'industrie cinématographie (coursier, assistant réalisateur...), et furieux qu'on lui refuse sa place à la Guilde des Directeurs d'Amérique alors qu'il a terminé premier au concours (tout ça parce qu'il a arrêté l'école à seize ans et qu'il n'a pas de diplôme universitaire, critère indispensable pour pouvoir entrer dans la Guilde),  John Landis décide de se débrouiller par lui-même et parvient, avec beaucoup de débrouillardise, à réunir 60 000$ et une équipe pour tourner son premier film, et ce, à l'âge de 21 ans ! Ce sera donc Schlock, réalisé en 1973, une oeuvre qu'on pourrait considérer comme mineure dans la filmographie de Landis mais qui contient déjà beaucoup de sa personnalité et, bien sûr, possède beaucoup d'humour, un élément qu'on retrouvera tout au long de sa carrière. Faut-il rappeler que John Landis est le réalisateur de comédies farfelues telles Hamburger Film Sandwich (1977), American College (1978), Les Blues Brothers (1980), Un Fauteuil pour Deux (1983), Drôles d'espions (1985), Un Prince à New York (1988),  L'embrouille est dans le sac (1991) ou Blues Brothers 2000 (1998) ? Même lorsqu'il aborde le genre fantastique (Le Loup-Garou de Londres en 1981, Innocent Blood en 1992) ou le polar (Série Noire pour une Nuit Blanche en 1985, Le Flic de Beverly Hills 3 en 1994), l'aspect humoristique est bien présent et répond à l'appel. Pas étonnant donc que pour son premier film, le réalisateur du plus grand clip vidéo au monde (Thriller de Michael Jackson évidemment) ait choisi de mettre en scène une comédie fantastique, dans laquelle une sorte de yéti, âgé de vingt millions d'années, fait surface dans une petite ville et sème la zizanie, le tout dans une avalanche de gags loufoques qui fonctionnent plus ou moins bien. Outre cette bonne dose d'humour, on retrouve également dans Schlock la "culture ciné" de John Landis, le réalisateur étant une véritable encyclopédie vivante dans ce domaine. Même s'il vénère des auteurs comme Fellini, Kurosawa, Ford ou Hitchcock entre autres, il voue un amour particulier pour les petites séries B fantastiques mettant en scène des monstres de toutes sortes et il le prouve ici, avec le personnage de Schlock bien sûr (cet homme-singe peut aussi bien rendre hommage au King Kong de 1933 qu'au nanar Trog de 1970) mais aussi à travers divers clins d'oeil, comme lors de la scène dans le cinéma, où, assis à côté de Forrest J. Ackerman (le créateur de la célèbre revue Famous Monsters on Filmland et collectionneur invétéré du cinéma fantastique), notre homme-singe regarde tantôt des séquences des Monstres de l'île en Feu (1960), tantôt des scènes de Blob, Danger Planétaire (1958). Même le Frankenstein (1931) de James Whale est cité à travers la scène où notre monstre simiesque joue avec une petite fille au bord d'un lac. Sympa ! Impossible de ne pas sourire également devant la scène qui rend hommage au 2001 l'Odyssée de l'Espace de Kubrick, le monolithe noir étant remplacé ici par une... banane ! On le voit, Schlock ne se prend jamais au sérieux et John Landis assume l'aspect parodique de son film jusqu'au bout, balançant des gags potaches qui font souvent sourire, à défaut de nous faire hurler de rire. Les personnages sont pour la plupart des débiles profonds (la palme revenant à l'inspecteur de police et ses équipiers qui auraient très bien pu postuler pour jouer dans la saga des Police Academy) et le comique surgit de situations ou comportements improbables, comme lorsque le monstre se balade au milieu de la foule sans que personne ne semble s'en inquiéter le moins du monde, alors qu'il est quand même l'auteur de plus de 279 morts violentes, rien que ça ! La scène qui ouvre le film est à ce titre un monument du n'importe quoi jubilatoire, avec ce présentateur télé qui relate le carnage qui vient d'avoir lieu et qui en profite pour proposer aux spectateurs de la chaîne un jeu concours, le gagnant étant celui qui trouvera combien de corps sont entassés dans des sacs poubelles ! Avec un casting composé principalement d'inconnus qui cabotinent à fond la caisse, avec des dialogues savoureux de ringardise, Schlock n'a pas peur d'en faire trop et se révèle au final drôle et divertissant derrière son aspect nanaresque. Un aspect revendiqué par John Landis lui-même, qui s'excuse d'ailleurs auprès des spectateurs de leur proposer un spectacle "calamiteux mais aussi loufoque". Calamiteux, le mot est, de mon point de vue, bien trop fort pour ce divertissement pas prise de tête qui s"assume totalement. Car si Schlock possède effectivement des défauts, pour un premier film et avec un budget aussi réduit, le résultat final est loin d'être déshonorant, bien au contraire. Surtout que l'ami John Landis a su s'adjoindre le talent d'un certain Rick Baker pour la confection du costume et surtout du masque de Schlock et le résultat est vraiment épatant, notre homme-singe possédant des expressions faciales assez étonnantes. Pour l'anecdote, c'est John Landis lui-même qui est dans le costume de Schlock et avec un tournage caniculaire de onze ou douze jours, on se doute que ça n'a pas du être une partie de plaisir. Landis et Baker auront à nouveau l'occasion de tourner ensemble sur Le Loup-Garou de Londres et sur Thriller. Bref, si vous voulez vous amusez ou vous détendre devant le premier film de John Landis, qu'on a souvent tendance à occulter de sa filmographie, n'hésitez pas et enclenchez Schlock dans votre lecteur DVD ou Blu-Ray. Ce n'est certes pas le film du siècle mais si vous êtes amateur d'absurde et de loufoquerie, ça passe comme une lettre à la poste !

* Disponible en DVD et BR chez -> CARLOTTA <-

LE BR :
Avec une nouvelle restauration 4K approuvée par John Landis lui-même, Schlock débarque pour la première fois en BR (et DVD) chez Carlotta qui nous propose donc une copie assez bluffante, avec un beau grain cinéma. N'ayant jamais vu le film auparavant, c'est avec une bien belle image que j'ai donc pu le découvrir. Le film est proposé en VF ou VOSTF. Parmi les bonus, on trouve une interview de 41 minutes de John Landis qui revient sur les débuts de sa carrière et sur comment il a été amené à réalisé Schlock. Une interview passionnante et dans laquelle Landis clame son amour de Massacre à la Tronçonneuse de Tobe Hooper ! Ce dernier étant le film préféré de votre serviteur, je ne peux donc que vénérer John Landis ! Autre bonus, une courte interview de Bob Collins, directeur de la photographie (8 min.) Ensuite, John Landis commente la bande-annonce remontée de Schlock, qui devient pour l'occasion Banana Monster ! Des bandes-annonces et sports radio, ainsi qu'un commentaire audio de Landis et Baker viennent compléter cette bien belle édition qui va permettre à Schlock de retrouver une seconde jeunesse et de sortir de l'oubli.

samedi 15 juin 2019

DEATH MACHINES

DEATH MACHINES
(Death Machines)

Réalisateur : Paul Kyriazi
Année : 1976
Scénariste : Paul Kyriazi, Joe Walders
Pays : Etats-Unis
Genre : Action
Interdiction : -12 ans
Avec : Ronald L. Marchini, Michael Chong, Joshua Johnson, Mari Honjo...


L'HISTOIRE : Madame Lee, une dangereuse et machiavélique Dragon Lady, a injecté un sérum à trois experts en arts-martiaux afin de les transformer en zombies qu'elle pourra contrôler dans le but de supprimer ses ennemis. Échappant à un massacre, Frank va essayer de retrouver ces mystérieux tueurs qui laissent tant de morts sur leur passage...

MON AVIS : Sacré scénario qu'on nous propose là, vous ne trouvez pas ? Décidément, les 70's sont vraiment une décennie qui nous en a donné pour notre argent et qui ne brimé pas les réalisateurs et les scénaristes, les laissant donner libre cours à leurs imaginations débridées. Avec Death Machines, le réalisateur Paul Kyriazi nous livre le premier film de sa courte carrière (6 films entre 1976 et 2018) et il envoie l'artillerie lourde avec ce mélange de film d'action et de karaté, le tout sur un postulat fantastique (bien que très peu développé et c'est dommage) puisque les trois tueurs du film résistent aux balles tel le futur Terminator ! Film totalement badass, Death Machines mérite largement mieux que les tristes notes que certains spectateurs lui attribuent (3,8 / 10 sur Imdb ! Scandaleux !) tant le spectacle proposé ne fait pas dans la dentelle et se montre généreux. Alors oui, on nage parfois dans le grand n'importe quoi, voir même dans le nanar de compétition mais franchement, je me suis bien éclaté à le visionner parce que c'est quand même vachement festif et que malgré ses défauts, j'ai trouvé ça hyper fun, parfois très con aussi il faut le dire mais ça ne me dérangerait pas du tout de le revoir, ce qui est évidemment un gage de qualité en ce qui me concerne. Car il faut bien se rendre à l'évidence : je dirais "non" si on me proposait de revoir Avengers Endgame, et je dirais "oui" si on me proposait de revoir Death Machines. Ça peut paraître surréaliste de dire ça mais c'est pourtant le cas. Paul Kyriazi nous propose donc en vedette trois tueurs experts en arts-martiaux : un blanc, un asiatique et un noir. Un beau mélange de couleur pour un film qui n'est pourtant pas sponsorisé par Benetton. Respectivement interprété par Ronald L. Marchini, Michael Chong et Joshua Johnson, ces trois athlètes vont nous offrir plusieurs séquences dantesques qui n'ont pas peurs d'en faire trop comme l'incroyable carnage dans l'école de karaté par exemple ou les mises à mort de quelques cibles désignées ! Charles Bronson n'a qu'à bien se tenir car neuf ans avec Le Justicier de New York, les tueurs de Death Machines s'amusaient déjà à envoyer ad patres leurs ennemis à grand coup de bazooka ! Sans pitié, agissant tel des cyborgs que rien ne semblent pourvoir stopper, les trois tueurs vont tout de même avoir un peu de fil à retordre avec le jeune Frank, seul rescapé du massacre de l'école de karaté et qui aura perdu sa main droite à l'occasion. Bien décidé à se venger, ce dernier va avoir un traitement à l'écran assez curieux de la part de Paul Kyriazi, qui lui fourgue une fille dans les bras et en oublie presque sa mission vengeresse lors de la dernière demi-heure du film. Une dernière demi-heure un peu en deçà de tout ce qui a précédé d'ailleurs, qui tire en longueur et manque de punch. Pas bien grave puisque la première heure nous en a donné pour notre argent, avec des bastons, des fusillades et encore des bastons en veux-tu en voilà ! On a même une scène totalement hallucinée et hallucinante, je ne sais pas si le réalisateur était sous l'effet de drogue quand il l'a tourné mais pour le coup, j'en suis resté scotché et les yeux hagards ! Je m'explique : dans le film, on a deux enquêteurs de la brigade criminelle qui, je vous le donne en mille, enquêtent sur le trio des tueurs ! Non ? Si ! Rien d'anormal jusque là et vous avez raison; Par contre, ils ont un supérieur pas commode qui s'appelle le capitaine Green ! Green comme "vert" en français. Et croyez-le ou non mais quand le capitaine est à l'écran, il a le tient vert ! Pas parce qu'il est malade, non, il a réellement la peau verdâtre, un peu comme Hulk ! Si, je vous le jure ! J'étais plié en deux dans mon fauteuil, parce que juste derrière le capitaine, joué par Félix McGill, il y a la porte de son bureau avec l'étiquette "Cpt. Green". Impayable ! Death Machines est donc un gros foutoir souvent jubilatoire dans ses maladresses et ses approximations mais franchement, ça vaut le coup d'oeil; Les fans de cinoche d'exploitation ne s'y sont pas trompés puisque ce film est considéré comme culte. Une pellicule sacrément burnée qui fait du bien par où elle passe !


vendredi 14 juin 2019

SUDDEN DEATH

SUDDEN DEATH
(Sudden Death / Mort Subite)

Réalisateur : Eddie Romero
Année : 1977
Scénariste : Oscar Williams
Pays : Etats-Unis
Genre : Action
Interdiction : -12 ans
Avec : Robert Conrad, Don Stroud, Felton Perry, John Ashley, Nancy Conrad...


L'HISTOIRE : Après avoir vu sa femme et ses enfants froidement abattus au fusil, Ed Neilson, qui a réchappé au massacre, tente d'engager Duke Smith, un ex-agent de la C.I.A, véritable machine de guerre. Ce dernier, qui vit paisiblement avec sa femme Maya, sa fille Melissa et un vieil ami surnommé "Buffalo", refuse de reprendre du service. Mais lorsqu'il apprend la mort de Ed, brûlé vif après l'explosion de sa voiture, il décide d'agir. Avec l'aide de son compagnon d'arme Wyatt Spain, Duke Smith va tout faire pour trouver les assassins de la famille Neilson et la venger...

MON AVIS : Né aux Philippines, le réalisateur Eddie Romero est bien connu des amateurs de cinéma d'exploitation, notamment grâce à sa trilogie Blood Island, qui comprend Brides of Blood, Mad Doctor of Blood Island et Beast of Blood. On luit doit également des films comme Beast of the Yellow Night, The Twilight People, Beyond AtlantisBlack Mama White MamaSavage Sisters ou ce Sudden Death réalisé en 1977 et dont je vais vous parler ici. Film d'action 70's, Sudden Death, qui est sorti en VHS chez nous sous le titre Mort Subite (logique), a la particularité d'avoir en vedette Robert Conrad dans l'une de ses rares apparitions dans un film de cinéma, l'acteur culte des séries Les Mystères de l'Ouest ou Les Têtes Brûlées étant plutôt abonné aux téléfilms ou aux séries télévisées. Il interprète avec son charisme habituel le héros du film, Duke Smith, et le moins que l'on puisse dire, c'est que ça nous change de ses autres personnages plus connus. Dans Sudden Death, Robert Conrad, qui joue avec sa propre fille Nancy Conrad, se laisse totalement aller, balance des répliques pas piquées des hannetons, jouent les durs à cuir et n'hésite pas à utiliser ses poings et ses pieds pour parvenir à ses fins dans les nombreuses séquences de castagnes qui rythment le film. Un film qui débute par une scène très agressive, puisque toute une famille, enfants compris, se fait massacrer à coup de fusil à pompe, la caméra ne se faisant jamais la malle et filmant complaisamment les impacts sanglants sur le corps des adultes mais aussi des pauvres petits chérubins qui n'avaient rien demandé. Une entrée en matière plutôt efficace pour cette petite série B qui ne l'est pas moins. Le duo Robert Conrad / Felton Perry fait des étincelles, que ce soit au niveau des dialogues, à l'humour pas toujours très fin mais qui nous font bien sourire, ou lors des bastons ou gunfights. Un duo qui sera rejoint dans la dernière partie du film par un troisième lascar bien connu lui aussi, à savoir l'acteur Don Stroud. Celui-ci incarne un tueur à gages corse qui connaît bien la dangerosité de Duke Smith et de son compère. L'affrontement final entre Conrad et Stroud sera le clou de ce spectacle décérébré et assez jouissif. Comme déjà évoqué, l'humour est de la partie et Eddie Romero ne semble pas s'imposer de limite, comme en témoigne certaines scènes "What the Fuck ??", à l'image de celle dans laquelle nos deux héros visitent un bordel et ouvrent la porte d'une chambre nous présentant un homme et... une chèvre ! Ou encore celle dans laquelle un des commanditaires de l'assassinat de la famille Neilson est surpris au lit avec... un garçon de 13/14 ans ! Ou bien encore celle où un espion, planqué dans les hautes herbes, se laisse uriner dessus sous peine de perdre sa couverture ! On le voit, Sudden Death est un pur film d'exploitation, un pur film de cinéma Bis qui ravira les amateurs de films à petits budgets. Sans être un grand film d'action, loin s'en faut, Sudden Death mérite le coup d'oeil et nous fait passer un agréable moment. C'est un divertissement sympathique, dont l'ensemble contraste fortement avec la scène d'introduction et la scène de conclusion, totalement nihilistes quant à elles. De la bagarre, de la violence, de l'action, de l'humour, des dialogues pêchus et des acteurs charismatiques, voici le cocktail proposé par Sudden Death. Si ça donne pas envie...


jeudi 13 juin 2019

LA MOTOCYCLETTE

LA MOTOCYCLETTE
(The Girl on a Motorcycle)

Réalisateur : Jack Cardiff
Année : 1968
Scénariste : Ronald Duncan
Pays : Angleterre, France
Genre : Drame, Romance
Interdiction : -16 ans
Avec : Marianne Faithfull, Alain Delon, Roger Mutton, Marius Goring, Catherine Jourdan...


L'HISTOIRE : Mariée depuis peu à Raymond, la belle Rebecca fait des rêves étranges : dans un cirque, debout sur un cheval blanc, elle se fait fouetter par Daniel. A son réveil, Rebecca laisse Raymond endormi, revêt sa combinaison de cuir à même la peau et chevauche sa moto, à la recherche de Daniel...

MON AVIS : Adaptation d'un roman de André Pieyre de Mandiargues, La Motocyclette est un film réalisé en 1968 par Jack Cardiff. Ce directeur de la photographie virtuose, pionnier de l'utilisation du Technicolor, qui a travaillé pour des réalisateurs prestigieux comme Michael Powell, Alfred Hitchcock, King Vidor ou Joseph Mankiewicz entre autres, est également un metteur en scène brillant puisqu'on lui doit Le Lion (1962), Les Drakkars (1964), Le Jeune Cassidy (1964), Le Dernier Train du Katanga (1968) ou bien encore l'extravagant The Mutations (1974). En 1968, il réunit donc la star française Alain Delon et la chanteuse / actrice Marianne Faithfull dans La Motocyclette, curieux film qui mêle drame, romance, road movie et trip psychédélique. Une oeuvre assez déroutante puisque malgré quelques dialogues bien présents, la quasi majorité du film nous fait entendre Marianne Faithfull réfléchir et analyser sa vie via une voix-off. Plus qu'un film d'ailleurs, La Motocyclette est une expérience sensitive et visuelle, et se veut une ode au féminisme, à la liberté de vivre sa vie comme on l'entend. Le scénario est particulièrement simpliste puisqu'il nous présente la belle Rebecca (Faithfull), récemment mariée à Raymond (Roger Mutton). Mais ce dernier se montre bien trop sage pour la jeune femme, qui veut s'éclater et avoir une sexualité épanouie, sans carcan, sans tabou. Elle ne rêve que de son amant, le ténébreux Daniel (Delon), rencontré lors d'une escapade au ski. Consciente qu'elle mène une vie qui ne lui correspond pas, elle décide de tout plaquer, de laisser Raymond derrière elle et enfourche sa moto pour aller rejoindre Daniel. On assiste alors à ses pérégrinations routières tout en "l'écoutant" parler d'elle et en regardant divers flashback de sa vie passée. La moto est évidemment un élément central de l'histoire, la fidèle monture, offerte par Daniel, va lui permettre de se sentir libre, de pouvoir briser les chaînes du mariage et de vivre pleinement sa destinée. Cette thématique de la vraie liberté, on la retrouvera bien sûr l'année suivante, en 1969, avec le Easy Rider de Dennis Hopper, dont La Motocyclette peut se voir comme une sorte de penchant féminin. Le film se targue même de nous présenter quelques scènes originales avec des effets psychédéliques et des couleurs criardes, comme si on était dans un trip hallucinatoire. Evidemment, celle qui illumine le film et lui donne tout son intérêt, c'est la ravissante Marianne Faithfull, alors âgée de 22 ans. La jolie blondinette nous offre la vision de son corps nue de manière rapide avant de le faire disparaître dans sa combinaison de cuir moulante. La pouvoir érotique de l'esprit fait alors le reste et jamais on ne peut oublier que sous son habit de cuir, la divine chanteuse est nue. Son sourire pétillant, qu'elle déploie dès lors qu'elle chevauche sa monture mécanique, achève de transfigurer le spectateur qui ne peut que succomber devant sa beauté et son charme. Alain Delon se la joue un brin macho, mâle dominant qui contraste avec la passivité apparente du pauvre Raymond qui ne peut rivaliser avec son ténébreux rival. Là où La Motocyclette peut également surprendre et déstabiliser son public, c'est dans son montage et dans l'enchaînement des flashback car parfois, le spectateur perd des repères et ne sait plus trop si on est dans le présent ou dans le passé. J'avoue d'ailleurs que le rythme du film et sa structure même ne m'ont pas convaincu plus que ça et que j'ai trouvé parfois le temps un peu long. Filmé à Paris, à Strasbourg, à Genève ou à Heidelberg, La Motocyclette est un road movie dans lequel il ne se passe pas grand chose en fait, si ce n'est qu'on est ballotté sans cesse entre la réalité et l'imaginaire du personnage principal. Un voyage étrange, très girl power, un trip introspectif parfois kitsch mais pas inintéressant, un récit initiatique auquel on adhère ou pas. 

* Disponible en DVD chez ARTUS FILMS



mercredi 12 juin 2019

LE MANOIR DE LA TERREUR

LE MANOIR DE LA TEREUR
(Le Notti del Terrore / Burial Ground)

Réalisateur : Andrea Bianchi
Année : 1981
Scénariste : Piero Regnoli
Pays : Italie
Genre : Horreur, Gore
Interdiction : -16 ans
Avec : Karin Well, Mariangela Giordano, Gianluigi Chirizzi, Antonella Antinori, Peter Bark...


L'HISTOIRE : Un vieux professeur fait une découverte concernant une ancienne malédiction étrusque. En fouillant une ancienne caverne jouxtant son manoir, il s'aperçoit que la malédiction est déjà en marche et que les morts se sont relevés de leur tombeau. Peu de temps après, plusieurs couples invités par le professeur débarquent au manoir. Leur séjour va vite se transformer en cauchemar quand les morts vivants vont venir jouer les troubles-fêtes...

MON AVIS : Réalisateur en 1975 du giallo Nue pour l'Assassin avec Edwige Fenech et Femi Benussi, Andrea Bianchi possède une petite filmographie de vingt-cinq films dont le plus célèbre auprès des fans de cinéma Bis reste sans contestation possible Le Manoir de la Terreur, qu'il met en scène en 1981. Considéré comme un nanar par les cinéphiles "respectables", Le Manoir de la Terreur possède sa horde de fans invétérés qui lui voue un culte de par le monde. Il faut dire que le spectacle proposé est en effet assez ahurissant et défie toute tentative d'analyse filmique. En clair, le film d'Andrea Bianchi est un gros foutoir nonsensique qui ne s’embarrasse d'aucune contrainte scénaristique et ne s'interdit aucun excès, aucun délire, quitte à provoquer chez le spectateur des fous rires au lieu de le terroriser. Rien que l'histoire en elle-même ne fait pas dans la dentelle et provoquera moult interrogations qui ne trouveront, bien sûr, aucune réponse. Pourquoi les morts redeviennent vivants ? Pourquoi possèdent-ils la faculté de s'armer ? Pourquoi ont-ils même un semblant d'intelligence, comme lorsqu'ils se regroupent en tenant un tronc d'arbre en guise de bélier pour enfoncer une porte close ? Et après tout, pourquoi pas me direz-vous ? On nage en plein Bis italien oui ou non ? Le Manoir de la Terreur tient donc du délire le plus total et se contente durant 81 minutes environ de se livrer à un petit jeu de massacre gore dans lequel la grande majorité du casting passe de vie à trépas, trépané, décapité, éventré par une armée de zombies putréfiés qui renvoient à ceux de L'Enfer des Zombies de Lucio Fulci. Visages pourrissants, mains décharnées, asticots et vers sur le visage et autres détails peu ragoutant, les morts vivants d'Andrea Bianchi sentent la charogne et ne sont pas de première jeunesse. Les maquillages de Mauro Gavazzi et Rosario Prestopino, associés aux effets gores de Gino De Rossi, sont, en ce qui me concerne, plutôt réussis et participent pleinement au charme et au plaisir ressentis durant la vision du film. Le sang gicle à foison, les tripes sont arrachées et extirpées du ventre des pauvres victimes qui peinent à lutter contre les zombies qui, pourtant, n'avancent pas bien vite. Il faut dire qu'au lieu de sa barrer en quatrième vitesse, les protagonistes préfèrent s'enfermer dans les pièces du manoir, prises d'assaut par les morts. Bon, OK, à leur décharge, on dira que s'ils s'étaient sauvés, il n'y aurait pas eu de film. C'est pas faux ! Et ça aurait été bien dommage puisqu'on aurait raté des scènes anthologiques dans la rubrique "grand n'importe quoi jubilatoire" ! Par exemple, cette séquence hallucinante dans laquelle un mort vivant, armé d'un faux, vient décapiter une domestique qui passait la tête par une fenêtre ! Et que dire des actrices qui passent leur temps à hurler durant tout le film (la blonde Karin Well, la brune Antonella Antinori entre autres) ou de la plantureuse Mariangela Giordano qui voit son fils (interprété par l'acteur adulte de petite taille Peter Bark et son visage incroyable) lui déclarer son complexe œdipien, allant même jusqu'à lui dévorer un sein lors d'une scène inoubliable ? Alors oui, le film et ses situations abracadabrantes (quid du piège à loup dans le jardin ?), son érotisme bon marché, son jeu d'acteurs approximatifs, son scénario cousu de fil blanc, ses scènes plagiées (le visage lacéré par une fenêtre brisée, filmé comme la séquence de l'écharde dans l’œil de L'Enfer des Zombies, le talent en moins), ses dialogues digne d'Audiard (non je rigole), son gore rigolo et sa musique synthétique à trois notes n'entreront jamais au panthéon des chefs-d’œuvres du genre. Mais pour les amateurs de cinéma d'horreur décomplexé comme seuls savent le faire les Italiens, ça vaut largement le détour. Il faut juste savoir à quoi s'attendre avant ! Bref, si vous voulez vous marrer entre potes devant cet ovni zombiesque, n'hésitez pas à vous rendre dans les couloirs de ce manoir qui ne provoquera pas de grand frissons mais bel et bien une belle tranche de rigolade !


lundi 10 juin 2019

LA ROSE ÉCORCHÉE

LA ROSE ÉCORCHÉE
(La Rose Écorchée / The Blood Rose)

Réalisateur : Claude Mulot
Année : 1970
Scénariste : Edgar Oppenheimer, Claude Mulot, Jean Larriaga
Pays : France
Genre : Fantastique
Interdiction : -12 ans
Avec : Philippe Lemaire, Anny Duperey, Elizabeth Teissier, Olivia Robin, Howard Vernon...


L'HISTOIRE : Le peintre Frédéric Lansac vit un amour idyllique auprès d'Anne dans leur château isolé au centre de la France lorsqu'un drame vient briser brutalement cette passion. Grièvement brûlée, l’épouse de Lansac est défigurée, sans espoir de guérison. Jusqu'au jour où un chirurgien accepte de lui redonner un visage. Mais pour que l'opération réussisse, la donneuse doit être sacrifiée…

MON AVIS : Le cinéma d’horreur n’a jamais été l’apanage de la France, les productions de notre pays étant plus orientées vers le fantastique, la féerie, avec des films comme La Belle et la Bête de Jean Cocteau par exemple. Il fallut attendre 1959 et Les Yeux sans Visage de George Franju pour que l’hexagone puisse enfin avoir son film d’horreur, qui était, néanmoins, emprunt de poésie exacerbée. Ce chef-d’œuvre allait ouvrir la voie à de nombreux cinéastes qui n’hésitèrent pas à s’inspirer ouvertement du film de Franju, tels Jess Franco avec L’horrible docteur Orlof et Le diabolique docteur Z (et plus tard avec Les prédateurs de la nuit). Ce sera aussi le cas de Claude Mulot, réalisateur de Sexyrella en 1968. Mulot décide donc de réaliser en 1970 La Rose Écorchée qui, comme vous avez pu le constater en lisant le résumé de l’histoire, s’inspire largement du film de Franju. Le film s’avère être une très bonne surprise, malgré son scénario un peu passe-partout. Comme bien souvent dans les films fantastiques français, le rythme est assez lent et l’amateur de séquences effrénées ne trouvera guère son bonheur dans ce cinéma contemplatif. Il serait néanmoins fort dommage de s’arrêter à ce détail et de se priver de la vision du film car dans son ensemble, il est vraiment digne d’intérêt. L’histoire d’amour tragique que nous présente Claude Mulot va en effet aller crescendo dans la dramaturgie et l’ambiance pessimiste qui s’en dégage est très bien entretenue par le réalisateur. La poésie est également bien présente dans cette œuvre (le titre est déjà très beau) et certains passages ne sont pas sans nous rappeler les films gothiques italiens des années 60. Le décor principal du film, à savoir le château aux couloirs labyrinthiques et ses jardins, sert particulièrement bien à restituer ce courant du cinéma d’épouvante. Un décor qui contraste fortement avec celui de l’institut de beauté et du jardin botanique, qui se révèlent d’une modernité exemplaire pour un film de cette époque. C’est dans ces différents endroits que les protagonistes vont vivre cette tragique histoire. Frédéric Lansac est interprété par Philippe Lemaire, acteur bien connu des amateurs de films de capes et d’épées ou de la saga Angélique Marquise des Anges. Sa ravissante compagne Anne est incarnée quant à elle par Anny Duperey, qu’on reverra en 1983 dans un autre film fantastique français, à savoir Le Démon dans l’île de Francis Leroi. Le célèbre Howard Vernon joue un personnage qu’il a interprété de nombreuses fois dans sa filmographie, celui d’un savant fou adepte de la chirurgie. Petite touche qui confère au film une certaine originalité et un certain décalage vis à vis du drame vécu par les deux héros, la présence de deux acteurs nains qui jouent les serviteurs de Frédéric Lansac. Vêtu d’une peau de bête pour l’un, privé d’un œil pour l’autre, ces deux compères font naître une impression d’étrangeté dans le film, qui était plutôt ancré dans la réalité. Ils participeront à une scène de tentative de viol sur une donneuse potentielle de visage qui apportera également une petite touche malsaine à l’œuvre. Dans le rôle de Moira, celle par qui le drame arrive, on reconnaîtra (ou pas) Elizabeth Teissier, vous savez, la célèbre astrologue française très controversée. Tous ces acteurs et actrices promènent leurs silhouettes de façon parfois un brin monolithique, rigide, presque théâtrale (surtout les acteurs masculins) mais parviennent à donner un corps et une âme au film et à l’emmener vers des territoires prompts à satisfaire pleinement le spectateur avide de curiosité. Comme dans les films de Jean Rollin ou de Jess Franco, auxquels on pense irrémédiablement en regardant La Rose Écorchée, la notion d’érotisme est présente. Les quelques actrices du film se retrouvent quasiment toutes dévêtues à un moment ou un autre. Cela reste fort soft et n’apporte pas grand chose de plus si ce n’est quelques visions plutôt agréables. Les séquences horrifiques sont également très sobres et fort peu visuelles, si ce n’est la scène où Anny Duperey se transforme en torche humaine. Claude Mulot joue beaucoup plus sur la suggestion, notamment en ne montrant jamais, tout au long du métrage, le visage ravagé par les flammes d’Anne, hormis vers la fin, ce dernier s’avèrant particulièrement hideux. Malgré l’influence de Les Yeux sans Visage, nous n’aurons pas droit à des séquences d’opérations comme on pouvait en attendre, le personnage joué par Howard Vernon étant peut-être le « plus humain » du film. Car Claude Mulot nous présente une galerie de personnages guère sympathiques. Frédéric Lansac est un homme à femmes, virevoltant et butinant comme bon lui semble, jusqu’à ce qu’il découvre l’amour véritable avec Anne. L’idée qu'un chirurgien puisse lui refaire le visage l’entraînera vers la folie, devenant coupable d’enlèvements et de meurtres. Les deux nains sont des êtres abjects et pervers, Anne qui était si douce devient, après son accident, tyrannique, susceptible, colérique et plonge également dans une folie dévastatrice. Le climat du film vire progressivement vers la démence de ses personnages et en rajoute ainsi à l’ambiance horrifique naissante, éclipsant la poésie romantique et macabre qui présidait jusque là. Après une première partie un peu statique et conçue sous forme de flashbacks qui alourdissent quelque peu le déroulement de l’histoire, La Rose Écorchée se transforme rapidement en conte déviant, alternant romantisme noir et poésie macabre de bien belle manière, avant de s’aventurer vers des horizons plus horrifiques. Le film de Claude Mulot ne démérite absolument pas de la comparaison avec les films gothiques anglais ou italiens. Son film reste un bel exemple de fantastique gothique à la française, dont une vision s’impose pour en apprécier toutes les caractéristiques. A noter que la partition musicale est de grande qualité et accompagne à merveille les images et l’ambiance qu’elle est censée créer.

* Disponible en combo DVD + BR + 4K chez LE CHAT QUI FUME 
C'est une première pour Le Chat qui Fume : le film de Claude Mulot est présenté en DVD, en BR mais aussi en 4K ! Ne disposant pas de lecteur Ultra HD, je ne peut vous dire si la différence est flagrante avec le BR. Toujours est-il que la copie de ce dernier est superbe et permet à cette brillante tentative de gothique à la française d'être visionnée avec un confort parfait. Niveau bonus, on trouve :
• Sur le tournage de La Rose écorchée (3min30)
• Interview d’Edgar Oppenheimer (25 min)
• Interview d’Hubert et Georges Baumann (11 min 30)
• Interview de Jacques Assuérus (35 min)
• Souvenirs de Claude Mulot par Brigitte Lahaie (9 min 30)
• La Rose écorchée en mode VHS (sur le Blu-ray) 
• Film annonce français et anglais


HAINE

HAINE
(Haine / Le Crédo de la Violence)

Réalisateur : Dominique Goult
Année : 1980
Scénariste : Dominique Goult
Pays : France
Genre : Drame, Survival
Interdiction : -16 ans
Avec : Klaus Kinski, Maria Schneider, Patrice Melennec, Evelyne Bouix, Katia Tchenko...


L'HISTOIRE : On ne sait qui il est, ni d'où il vient. Vêtu d'une combinaison blanche, il sillonne les routes de campagne sur sa moto. Le destin le conduit dans un village de la France profonde fraîchement marqué par la mort d'une enfant, fauchée par un deux-roues. Très vite, l'étranger ressent l'indifférence, puis le mépris et bientôt la haine de ces villageois confinés dans leurs préjugés. Seule Madeleine, mère célibataire, accepte de lui venir en aide. Mais tous les hommes du village, jusqu'au maire, ont trouvé en l'étranger leur bouc émissaire...

MON AVIS : Sortie dans un quasi anonymat le 9 janvier 1980 sur les écrans français, la faute à une interdiction aux moins de 18 ans totalement injustifiée, Haine est le cinquième et dernier film du réalisateur français Dominique Goult. C'est également son unique film non pornographique, ses quatre œuvres précédentes, réalisées sous le pseudonyme de Richard Stephen, relevant de ce domaine. Avec Haine, Dominique Goult a de l'ambition : faire un film de chasse à l'homme pour délivrer un message sur l'intolérance des gens et leur peur de l'étranger. Pour ce faire, il décide de raconter l'histoire d'un motard, interprété par Klaus Kinski, excusez du peu, qui devient le bouc-émissaire des habitants d'un petit village, ces derniers voulant venger la mort d'une fillette fauchée justement par un motard. Sans la moindre preuve, juste par bêtise et haine, le motard va donc devenir une cible toute désignée et va subir le courroux de quelques habitants, qui bénéficient de l'aval du maire et des parents de la fillette décédée. Seul le prêtre du village tentera, timidement, d'arrêter la folie meurtrière de ses paroissiens. Cette thématique n'est pas nouvelle au cinéma, on pense à Furie de Fritz Lang, à L'étrange Incident de William Wellman, à La poursuite Impitoyable d'Arthur Penn et bien sûr à Scènes de chasse en Bavière, quatre exemples dans lesquels la population se fait sa propre vindicte, oubliant tout jugement morale pour laisser libre cours à ses instincts les plus vils. Pour mettre en exergue sa réflexion, Dominique Goult va même aller jusqu'à donner une dimension christique au motard, qu'il habille tout de blanc (contrairement au motard responsable de la mort de la fillette, entièrement vêtu de noir) et qu'il fait quasiment crucifier en l'attachant, bras en croix, sur un module haute tension. Le fait que la seule "alliée" du personnage joué par Kinski se nomme Madeleine n'est pas une coïncidence non plus. Interprétée par Maria Schneider, la star du Dernier Tango à Paris, (Marie) Madeleine est une traînée aux yeux de la population qui ne désire que son départ. La rencontre entre ces deux êtres rejetés de tous était donc inévitable. Le sujet de Haine est donc un thème d'actualité et le film aurait très bien pu être tourné en 2019, la peur et le rejet de l'étranger n'ayant pas évolués dans les mentalités malheureusement. Concernant le film lui-même, on peut dire qu'il est attachant mais qu'il pourra décevoir les spectateurs s'attendant à un déferlement de violence ou d'action. Dominique Goult a préféré imposer un rythme lent, contemplatif, tout en mettant en avant une violence plus psychologique que frontale. Le motard comprend petit à petit qu'il n'est pas le bienvenu aux yeux de la population, qui ne lui témoigne pas le moindre signe de sympathie. L'acteur Patrice Melennec, très bon dans le film, joue le camionneur et sera le plus antipathique des habitants du village et celui par qui le drame arrivera. Sa haine, sa soif de vengeance l'aveugle totalement et il mettra tout en action pour faire du motard une bête traquée. L'affiche française du film nous fait penser au film de Spielberg, Duel, et effectivement, lors de la dernière demi-heure, on assiste bien à une course-poursuite entre le motard et le camionneur, le camion noir de ce dernier devenant à l'écran une sorte d'entité maléfique qui va transformer la vie du motard en cauchemar sans fin. Une chasse à l'homme qui manque un peu de punch, certes, mais qui se montre au final assez réaliste, avec ces paysans qui bloquent la route du motard à l'aide de tracteurs et j'en passe. C'est probablement comme ça que ce genre de situation se déroulerait en campagne. Haine aurait sûrement mérité un réalisateur plus aguerri pour lui donner une dimension plus pêchue, plus maîtrisée. Certaines situations se répètent un peu trop et le film semble parfois tourné un peu en rond, comme le malheureux héros du film qui semble prisonnier de ce village, ne parvenant jamais à le quitter, toujours victime d'une avarie sur sa moto ou d'un accident qui le ramène irrémédiablement à son point de départ, comme s'il était pris au piège d'un labyrinthe dont la seule issue serait la mort. C'est en tout cas une oeuvre que je ne connaissais pas du tout et que j'ai pris plaisir à découvrir. La présence de Klaus Kinski est un plus indéniable, la mise en image de la thématique choisie est réussie et lorsque le générique de fin survient, on repense à la citation de Stendhal, issue de son roman Le Rouge et le Noir, qui ouvre le film : "j'ai vécu assez pour voir que différence engendre haine". Un film français à découvrir en tout cas. 

* Disponible en combo DVD + BR chez LE CHAT QUI FUME 
Présenté en première mondiale et dans une version entièrement restaurée, Haine bénéficie du soin toujours apporté aux éditions du Chat qui Fume : boitier digipack avec fourreau, image de qualité et bonus sont, comme d'habitude, au programme, avec :
• Piste musicale isolée
• LA HAINE par Patrice Melennec (31 min 30)
• Sur le tournage du film HAINE (4 min)     


dimanche 9 juin 2019

LA NUIT DE LA MORT

LA NUIT DE LA MORT
(La Nuit de la Mort)

Réalisateur : Raphael Delpard
Année : 1980
Scénariste : Raphaël Delpard, Richard Joffo
Pays : France
Genre : Horreur, Gore
Interdiction : -12 ans
Avec : Isabelle Goguey, Charlotte de Turckheim, Michel Flavius, Betty Beckers,  Michel Debrane...


L'HISTOIRE : À la suite d'une dispute avec son ami Serge, Martine accepte un poste d'infirmière au « Doux Séjour », maison de retraite isolée en rase campagne. Elle sympathise rapidement avec Nicole, sa collègue de travail, qui disparaît bientôt dans de mystérieuses circonstances. Entre une directrice autoritaire, un gardien boiteux au comportement étrange et des pensionnaires passablement allumés, Martine finit par réaliser qu'elle est prisonnière de la maison mais surtout, qu’elle pourrait courir un grave danger...

MON AVIS : De la fin des années 50 au début des années 80, le cinéma fantastique, et encore plus le cinéma d'horreur, n'attire pas beaucoup de réalisateurs français. Seul Jean Rollin se spécialise dans le genre depuis les années 70 et bataille contre vents et marées pour proposer ce type de films en France. Malgré le succès du film de Franju, Les Yeux sans Visage (1959) et la persévérance de Jean Rollin, il faut se rendre à l'évidence : le fantastique et l'horreur ne connaîtront jamais d'âge d'or dans notre pays, sûrement trop cartésien, même si les années 40 et 50 ont vu pas mal de sorties dans le domaine du fantastique poétique et merveilleux, telles La Belle et la Bête, La Main du Diable, Les Belles de Nuit, Les Visiteurs du Soir par exemple. En 1978, Jean Rollin réalise un vrai film d'horreur avec Les Raisins de la Mort. En 1980, c'est Raphael Delpard qui lui emboîte le pas avec La Nuit de la Mort, un film souvent décrit comme étant un nanar (parce que français ?) mais qui mérite bien mieux que cette appellation injustifiée. Déjà, c'est le film qui révéla au public l'actrice Charlotte de Turckheim, qui le renie totalement aujourd'hui et on a du mal à comprendre pourquoi. Est-ce parce qu'elle y apparaît nue ? Possible. Reste que sa prestation, assez courte en fait, n'est pas mauvaise et qu'elle est la star de la grande scène gore du film qui plus est, scène qui la laissera dans un triste état, ce qui fera par contre la joie des éditeurs qui ont souvent utilisé ce visuel pour illustrer leurs jaquettes du film. La véritable héroïne de La Nuit de la Mort est Isabelle Goguey, qui avoue dans un bonus de l'édition du Chat qui Fume détester se voir à l'écran alors que dans le film de Raphael Delpard, elle est tout simplement charmante et craquante. Elle joue le rôle de Martine, nouvelle infirmière qui débarque dans cette drôle de maison de retraite qui va lui réserver bien des surprises et des frissons ! Le réalisateur ne tarde pas trop avant de nous dévoiler le pot-aux-roses puisqu'au bout d'une petite demi-heure environ, on découvre à quelles curieuses activités nocturnes se livrent les résidents, qui agissent avec l'approbation de la directrice de l'établissement et du gardien inquiétant. Le film prend alors une autre dimension puisque nous, spectateurs, savons de quoi il retourne, à contrario de la jolie Martine qui sent bien que quelque chose de bizarre se trame sans savoir quoi. On se demande alors comment va-t-elle échapper à son triste sort potentiel et on frissonne gentiment quand, lorsqu'elle est endormie dans sa chambre, on entend les pas des résidents qui font grincer le plancher dans le couloir. Le suspense est bien en place et l'ambiance, assez malsaine de par le cadre de l'action et  l'âge de ses principaux protagonistes, fonctionne plutôt bien. On sent que Raphael Delpard apporte un soin particulier à mettre en place son atmosphère délétère et qu'il désire livrer un film d'horreur de qualité. Sa variation du thème de la Comtesse Bathory, rapportée aux résidents d'une pension de retraite, est assez originale. Surtout que l'action du film est accompagné par une très bonne partition musicale de Laurent Petitgirard, qui parvient sans peine à créer une ambiance oppressante, morbide et inquiétante. La séquence où les vieux résidents sortent un à un de leur chambre pour créer un groupe à l'allure angoissante est l'une des meilleures séquences du film. Les différents acteurs et actrices interprétants les résidents ont été particulièrement bien choisis et leurs physiques, leurs attitudes et surtout leurs regards correspondent tout à fait à l'ambiance et à l'effet recherchés par le réalisateur. Ce dernier n'est pas à cours d'idées en plus et il nous réserve deux belles surprises vers la fin du film, avec des rebondissements, des retournements de situation et surtout un twist final qui nous pendait au nez depuis le début mais qui n'avait jamais été évoqué frontalement, juste par petites touches, par petits détails. Au final, La Nuit de la Mort peut largement être considéré comme l'un des premiers fleurons de l'horreur à la française et Raphael Delpard peut être fier d'avoir participé à poser l'une des premières fondations qui nous mènera quelques années plus tard à des films comme Haute Tension, A L'Intérieur ou bien encore Martyrs.   

* Disponible en combo DVD + BR chez LE CHAT QUI FUME
On redécouvre totalement le film grâce à cette belle édition qui nous propose une image bien définie et sans défaut. Niveau bonus, on trouve :
• Nuit horrifique avec Isabelle Goguey (35mn)
• Le tournage de la mort avec Raphaël Delpard (34mn)
• Comparatif image (21mn)
• Films annonces


samedi 8 juin 2019

LA SAIGNÉE

LA SAIGNÉE
(La Saignée)

Réalisateur : Claude Mulot
Année : 1971
Scénariste : Claude Mulot, Edgar Oppenheimer, Albert Kantof 
Pays : France, Italie
Genre : Drame
Interdiction : -12 ans
Avec : Bruno Pradal, Charles Southwood, Gabriele Tinti, Ewa Swann, Gérard Croce...


L'HISTOIRE : Témoin d'un meurtre perpétré par un parrain de la pègre, Thomas Chanard est contraint de quitter New York pour retourner à Cayeux-sur-Mer, sa ville natale. Il est suivi à son insu par deux hommes : un policier chargé de le reconduire aux États-Unis afin de témoigner et un tueur à gages engagé par la mafia pour l'abattre. Le retour du « fils prodigue » ravive également des conflits au sein de la bourgeoisie locale. Pour Thomas, les ennuis sont loin d'être terminés… 

MON AVIS : Le réalisateur Claude Mulot est une personne atypique dans le paysage cinématographique français. S'il est principalement connu grâce à ses films pornographiques qu'il a réalisé sous le pseudonyme de  Frédéric Lansac, dont certains sont devenus cultes, tels Le Sexe qui Parle (1975) ou La Femme Objet (1980), Claude Mulot est aussi l'auteur, surtout dans la première partie de sa carrière, de films oubliés ou méconnus qui méritent d'être redécouverts. On citera évidemment La Rose Écorchée (1970), Profession : Aventuriers (1973), Les Charnelles (1973) ou Le Couteau sous la gorge (1986) qui sera son dernier film puisqu'il décédera en cette même année 1986, à l'âge de 44 ans. A cette petite liste non exhaustive, il faut bien sûr ajouter La Saignée, réalisé en 1971. Un film que je ne connaissais pas du tout mais dont j'ai pris un réel plaisir à découvrir grâce à la superbe édition BR / DVD qui vient de sortir chez Le Chat qui Fume. Si le début du film peut s'apparenter à un polar, avec ce jeune homme témoin de deux meurtres commis par un parrain de la mafia new-yorkaise, la suite bifurque vers le drame nihiliste teinté de fable sociale. Car une fois de retour dans la petite ville balnéaire française de Cayeux-sur-Mer, Thomas Chanard, le héros superbement interprété par Bruno Pradal (jeune acteur qui connu la rançon du succès en ce début d'année 1971 avec le film Mourir d'Aimer de André Cayatte), va aller de malheur en malheur, piégé dans une spirale infernale de désillusion que rien ne semble venir arrêter. Plus on avance dans le film et plus on découvre que la vie de Thomas Chanard est placé sous le signe de l'échec : il vivait une belle histoire d'amour avec Catherine (sublime Ewa Swann) mais l'homme le plus influent de la ville n'approuvait pas cette relation, dont sera issue un petit garçon qui ne connaîtra jamais son père, car il réservait Catherine à son fils, avec qui elle se mariera effectivement, ce qui provoquera le départ de Thomas pour New York. On apprend également que Thomas vit une relation conflictuelle avec sa mère, gérante d'un bar-hôtel à Cayeux-sur-Mer. Le retour de Thomas dans sa ville natale ne fait que conforter ce constat d'échec : toutes les portes se ferment à lui et dire qu'il ne semble pas être le bienvenu n'est pas exagéré. Les hommes importants de la ville n'apprécient pas sa présence, en particulier le mari de Catherine qui ne voit pas d'un bon œil les retrouvailles entre cette dernière et son ex-amant. Bref, notre jeune héros a bien des soucis et ce n'est que le début car deux américains lui filent le train : un policier désirant le ramener avec lui à New York pour qu'il témoigne des meurtres et un tueur à gages bien déterminé à ne pas le laisser parler. Ces deux personnages haut en couleur, vont se livrer à un petit jeu du chat et de la souris façon partie d'échecs, partie dont l'une des pièces de l'échiquier n'est autre que Thomas Chanard bien sûr. Le policer, aux méthodes assez expéditives (ce n'est pas l'actrice Patti d'Arbanville qui me contredira, oui celle là même à qui Cat Stevens a dédié la chanson "Lady d'Arbanville") est interprété par Charles Southwood et le tueur à gages par l'excellent Gabrielle Tinti, le mari à la ville de la belle Laura Gemser. On le voit, le casting est de qualité et participe pleinement à tirer La Saignée vers le haut. La mise en scène de Claude Mulot est très bonne également, tout comme la photographie et surtout le travail sur l'ambiance. Certaines scènes sont très belles (la mort de Patti d'Arbanville), d'autres évoquent même le western (l'arrivée du bus et la descente des personnages dans des plans larges de toute beauté) et la violence se fait de plus en plus insistante au fur et à mesure de la progression de la dramaturgie, pour atteindre son apogée avec un lynchage non létal dans un décor boueux du plus bel effet. Le nihilisme est de toute la durée du film (85 minutes environ) et trouve son achèvement lors de la séquence finale qui refuse tout happy-end. La Saignée est un film 70's vraiment intéressant, baigné par une mélancolie ambiante qui ne se déride jamais. Un très beau film français, qui mérite bien mieux que l'oubli dans lequel il a été si longtemps confiné.

* Disponible en combo DVD + BR chez LE CHAT QUI FUME
Encore une fois, le matou fumeur nous livre une édition de grande qualité, avec un travail de restauration de l'image proprement sidérant, nous permettant de découvrir La Saignée dans des conditions optimales. Une édition bardée de bonus dont :
• Piste musicale isolée
• Interview d’Edgar Oppenheimer (14mn) 
• Interview de Didier-Philippe Gérard (36mn) 
• Interview d’Hubert et Georges Baumann (21 mn) 
• Interview de Jacques Assuérus (35 mn) 
• Interview de Gérard Croce (13 mn30) 
• Sur le tournage de La Saignée (6mn) 
• Projection du film avec Claude Mulot et Bruno Pradal (3mn) 
• La restauration de La Saignée (7mn) 
• Présentation de La Saignée à l’Étrange Festival de Paris (12mn) 
• La Saignée en mode VHS (Blu-ray) 
• Film annonce d’origine français et anglais