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AVERTISSEMENT : Certaines bandes-annonces ou extraits de films peuvent heurter la sensibilité du jeune public.




mardi 17 septembre 2019

JALOUSE

JALOUSE
(Jalouse)

Réalisateur : David Foenkinos, Stéphane Foenkinos
Année : 2017
Scénariste : David Foenkinos, Stéphane Foenkinos
Pays : France
Genre : Comédie, Drame
Interdiction : /
Avec : Karin Viard, Dara Tombroff, Anne Dorval, Bruno Todeschini...


L'HISTOIRE : Nathalie Pêcheux, professeur de lettres divorcée, passe quasiment du jour au lendemain de mère attentionnée à jalouse maladive. Si sa première cible est sa ravissante fille de 18 ans, Mathilde, danseuse classique, son champ d’action s’étend bientôt à ses amis, ses collègues, voire son voisinage...

MON AVIS : Les frères Foenkinos, réalisateurs de La Délicatesse en 2011, font leur retour derrière la caméra en 2017 avec Jalouse, excellente comédie dramatique qui vous fera très souvent sourire et rire, pour mieux vous émouvoir ensuite. Honnêtement, c'est typiquement le film que je n'aurai jamais regardé si on ne me l'avait pas prêté. Et ça aurait été bien dommage car j'ai pris grand plaisir à le visionner. Comme quoi, il est parfois bon de mettre ses préjugés de côté et d'oser tenter des expériences hors de sa zone de confort, car on n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise. Et Jalouse en est une, assurément. Ce très beau portrait de femme est un petit bijou d'écriture et Karin Viard en est l'interprète idéale. L'actrice est absolument fabuleuse à l'écran et elle se donne à 100% pour nous faire prendre en empathie son personnage qui n'est pourtant pas très sympa ! Si Jalouse traite évidemment de la jalousie maladive, de celle qui détruit, ronge et mène à la dépression, le film nous parle aussi de la crise de la cinquantaine, de la difficulté pour les femmes célibataires de cette tranche d'âge à mener une existence heureuse, étant constamment exposées au bonheur des autres ou à la jeunesse de leur enfant. Le rapport mère/fille est également mis en avant dans Jalouse et le duo Karin Viard / Dara Tombroff (la ravissante Mathilde) est parfait, touchant. Le film débute comme une véritable comédie, avec des dialogues ciselés qui font mouches à tous les coups, des répliques cruelles qui nous font bien rire, des situations inventives dans lesquelles Karin Viard est en pleine possession de son talent et s'en sert à merveille pour jouer cette mère qui, petit à petit, va sombrer dans un déséquilibre mental total, devenant acariâtre, irritable, et ce, avec sa fille, ses meilleurs amis ou ses collègues de travail. Une véritable peste en somme, qui ne supporte plus rien, et dont le comportement toxique va finir par l'isoler totalement des autres. Plus le film progresse, plus la méchanceté dont l'héroïne fait preuve devient de moins en moins drôle. Avec une précision d'horloger suisse, les frères Foenkinos assènent les coups bas pour notre plus grand plaisir (la confrontation entre Karin Viard et la nouvelle professeur de 28 ans, à mourir de rire par exemple) jusqu'au moment fatidique où tout dérape. La jalousie destructrice devient plus forte que la raison et le mal-être dont souffre l'héroïne finit par prendre le dessus et lui fait commettre l'inacceptable. A partir de ce terrible moment que je ne vous dévoilerais pas, on ne rit plus vraiment devant les exactions, les règlements de compte et les fourberies de Karin Viard et on en vient réellement à la plaindre, à se mettre à sa place, à essayer de comprendre sa souffrance psychologique. De mère jalouse, elle devient une femme au bord de la crise de nerf, qui va devoir prendre sur elle-même et trouver un moyen de s'en sortir. Ce moyen, elle le trouvera de fort belle manière. Si Karin Viard brille de mille feux dans Jalouse, le reste du casting n'est pas en reste et tous les acteurs de ce film sont au diapason. Je ne m'attendais pas du tout à être pris par la main par ce film et à ressentir autant d'émotion. Vraiment un film intelligent, amusant, divertissant, grinçant et touchant, qui mêle humour et drame avec maestria. Une bien belle surprise.


lundi 16 septembre 2019

PLUS JAMAIS

PLUS JAMAIS
(Enough)

Réalisateur : Michael Apted
Année : 2002
Scénariste : Nicholas Kazan
Pays : Etats-Unis
Genre : Drame, Thriller
Interdiction : -12 ans
Avec : Jennifer Lopez, Billy Campbell, Tessa Allen, Juliette Lewis, Noah Wyle...


L'HISTOIRE : Slim, une jeune serveuse, a toujours eu du mal à joindre les deux bouts, jusqu'à ce qu'elle épouse Mitch, un riche entrepreneur. Celle-ci vit dorénavant un véritable conte de fées, elle a tout ce dont elle peut rêver : un mari attentionné, une magnifique résidence dans une banlieue huppée, et Gracie, son adorable petite fille de cinq ans. Ce paradis s'effondre lorsque Slim découvre la véritable nature de Mitch. Elle finit par fuir ses mauvais traitements, son comportement obsessionnel et ses dangereux hommes de main. Mais malgré ses efforts pour se refaire une nouvelle vie, Mitch la retrouve et la menace à nouveau. Après avoir mis Gracie en sûreté, Slim va se consacrer corps et âme à un combat qu'elle n'a pas voulu mais qu'elle est décidée à gagner. Elle ne sera plus la victime mais l'adversaire...

MON AVIS : Curieux film que ce Plus Jamais, réalisé en 2002 par Michael Apted, à qui l'on doit Gorilles dans la Brume, Coeur de Tonnerre, Blink, Nell ou Le Monde ne Suffit Pas entre autres. Curieux car il emprunte à plusieurs genres et passe abruptement de l'un à l'autre, prenant même une direction inattendue et, avouons-le, assez ridicule, dans son final surréaliste. Le film démarre plutôt bien pourtant, avec son ambiance comédie romantique servie par une Jennifer Lopez attachante et une Juliette Lewis plutôt drôle. La rencontre entre Slim (Lopez) et Mitch (Billy Campbell) a tout du conte de fée : une jeune serveuse et un homme beau et riche, qui vient de lui éviter un rencart bidon avec un inconnu qui avait fait un pari avec ses amis, c'est la rencontre entre la princesse et son prince. Les premières années suivant le mariage sont également idylliques, avec une petite fille, Gracie, à la clé. Dans ce monde de Bisounours, un grain de sable va pourtant intervenir et faire basculer le film de la romance fleur-bleue au drame conjugal. Car Mitch n'est pas la personne qu'il semble être. Et quand Slim le découvre, il est trop tard. Le prince charmant redevient un horrible crapaud, qui trompe sa femme, veut avoir un contrôle absolu sur sa vie et va même jusqu'à la battre pour qu'elle comprenne bien ses règles à lui. Billy Campbell se montre absolument détestable dans ce rôle de mari psychotique et machiste, et on se dit que la suite de cette tragédie naissante va nous amener dans un drame intense qui va traiter du thème de la violence conjugale, avec dépôt de plainte, procès et parcours du combattant pour la victime. Raté. Si ces quelques points sont abordés, c'est de manière très superficielle et on comprend rapidement que Michael Apted  ne cherche pas du tout à faire un film réaliste sur ce sujet mais juste à mettre en scène un thriller qui utilise la violence conjugale comme base à l'histoire. La suite n'évite pas les poncifs et on se retrouve à suivre la traque entre Mitch et Slim, cette dernière s'étant enfui avec sa petite fille et essayant tant bien que mal de passer inaperçu, changeant d'apparence ou d'identité pour que son mari violent ne la retrouve pas. Quelques énormités nous sont présentées et c'est là qu'on se dit qu'on est bien dans un film américain, qui nous la joue comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Où qu'elle aille, Mitch parvient à retrouver sa femme en fuite, grâce à des hommes de mains peu respectables ou à l'aide d'une personne dont je ne vous dévoile pas l'identité car c'était une des bonnes surprises du film, je ne l'avais pas venu venir celle-là. Un peu d'action, un peu de suspense, la recette est éculée mais ça se regarde, la prestation de Jennifer Lopez étant plutôt bonne. Dommage que le final vienne plomber tout ce qui a précédé parce que là, on verse en plein délire. De la comédie romantique au drame conjugal, du thriller psychologique au film d'action, on bifurque carrément dans le film de vengeance surréaliste ! Car notre femme battue et en fuite va avoir une idée de génie : puisque tout semble perdu si elle va voir un avocat ou la police et que son mari risque d'avoir gain de cause vu ses connaissances et le fait qu'elle a "kidnappé" sa fille, autant prendre le taureau par les cornes ! La légitime défense n'est pas un meurtre clame la jaquette du DVD ! C'est dit ! Slim va alors s'octroyer les conseils d'un prof de self-defense et devenir une véritable guerrière, qui va appliquer la citation : la meilleure défense reste l'attaque ! Et d'aller chez son mari pour lui foutre la rouste de sa vie, voir à tenter de le tuer en faisant passer ça pour de la légitime défense, ayant bien compris que jamais il ne la laissera tranquille. Oui, oui, oui... mais bien sûr. Là, on sait qu'on a perdu toute crédibilité et qu'on va toucher le fond. Plus Jamais possède quelques légers atouts mais on a connu Michael Apted nettement plus inspiré quand même. Sa réalisation est terne, sans saveur, comme le scénario du film en fin de compte. Reste le casting, qui s'en sort assez bien et qui permet au film d'être visionné sans qu'on ait envie d'appuyer sur la touche accélérée de la télécommande. Un petit film qui finira par sombrer dans l'oubli, si ce n'est déjà fait.


      

dimanche 15 septembre 2019

MARIANNE SAISON 1

MARIANNE
(Marianne)

Réalisateur : Samuel Bodin
Année : 2019
Scénariste : Samuel Bodin, Quoc Dang Tran
Pays : France
Genre : Fantastique, épouvante
Interdiction : -16 ans
Avec : Victoire Du Bois, Lucie Boujenah, Tiphaine Daviot, Alban Lenoir, Ralph Amoussou...


L'HISTOIRE : Emma Larsimon est une auteure à succès, qui connaît la gloire grâce à sa série de romans d'horreur mettant en vedette Marianne, une terrible sorcière. Lors d'une séance de dédicace, elle reçoit la visite d'une ancienne camarade de son village natal, qui l'accuse d'avoir rendu folle sa mère, qui se prendrait pour Marianne après avoir dévoré plusieurs fois les romans. Suite à un terrible drame, Emma n'a d'autre choix que de se rendre à Elden, sa ville natal, accompagnée par Camille, son assistante. La jeune romancière va découvrir avec effroi que la terrible sorcière qu'elle a inventé dans ses livres semble avoir pris vie dans la réalité et provoque malheur et désolation parmi les personnes de son entourage, comme ses parents ou ses amis d'enfance...

MON AVIS : Une série horrifique française ! C'est assez rare pour le signaler et si intéresser ! Même si ce n'est pas une première dans le genre, puisqu'on a eu par exemple des séries comme Sable Noir en 2006 ou Dead Crossroads en 2012, on ne peut pas dire que l'horreur soit un genre très en vogue chez nous, que ce soit au cinéma ou dans les séries télévisées d'ailleurs. Le réalisateur Samuel Bodin (qui a mis en image le clip de la chanson Vacuity de Gojira en 2008) a décidé de tenter l'expérience et a puisé dans ses cauchemars d'enfant pour écrire le scénario de Marianne, série en huit épisodes qui a bénéficié de la coopération de Netflix à la production, ce qui lui permet d'être diffusée à grande échelle de par le monde. Alors, allons-nous en avoir pour notre argent niveau frisson, telle est la question qui nous vient tous à l'esprit, alléchés par l'affiche de la série et son slogan publicitaire, qui nous indique que Marianne est la série qu'on ne voudra pas regarder seul, rien que ça ! Et bien figurez-vous que cette publicité n'est pas mensongère et que les petites natures risquent effectivement d'aller appeler leur maman à la rescousse afin qu'elle rallume les lumières de la chambre ou du salon ! Samuel Bodin connaît assurément bien ses classiques, qu'ils soient anciens ou contemporains, et nous assènent des dizaines et des dizaines de jump-scares franchement réussis, qui risquent de vous faire bondir de votre fauteuil ou de vous procurer quelques nuits blanches, puissant aussi bien dans les clichés des films de maisons hantés, de fantômes que dans les films de possessions ou d'exorcismes. Samuel Bodin distille son ambiance avec efficacité, joue savamment sur la notion de peur à l'écran. Monstre caché dans les placards, derrière les portes ou sous les lits, tous les artifices mis à sa disposition sont utilisés dans l'unique but de vous flanquer une trouille d'enfer. Le personnage principal de Marianne n'est autre qu'une terrible entité, ancienne sorcière ayant été jadis enterrée mais dont le rituel de bannissement n'a pas été mené jusqu'à sa fin. Les rêves et les cauchemars de la jeune Emma, autre personnage principal de la série, ont toujours eu un lien avec cette sorcière, qui deviendra d'ailleurs le personnage récurrent de sa saga littéraire lue par des millions de lecteurs. La sorcière Marianne continue donc d'exister à travers les siècles de par les écrits d'Emma et cette entité va revenir parmi les vivants, prenant possession de différents personnages au cours des huit épisodes de cette première saison. Emma est interprétée par Victoire Du Bois. Avec son look de garçon manqué et son franc-parler, ce personnage ne nous apparaît pas franchement empathique de prime abord et on a même envie de la remettre à sa place plusieurs fois. C'est peut-être l'un des points faibles de Marianne, le fait d'avoir du mal à s'identifier ou apprécier l'héroïne, du moins en ce qui me concerne. Nul doute que la jeune actrice trouvera des fans au sein du public, tout autant que de haters. Il est vrai qu'elle a un comportement assez immature, un peu trop rebelle et exubérant, ce qui contraste avec les scènes dans lesquelles elle doit se montrer fragile ou triste. J'ai préféré le jeu d'actrice de Lucie Boujenah, qui joue Camille, l'assistante littéraire d'Emma. Plus en retenue, plus sobre, ce personnage est celui que j'ai préféré dans cette série. Le reste du casting s'en tire assez bien, notamment Tiphaine Daviot ou Ralph Amoussou entre autres. Certes, on sait qu'on regarde une série française mais ça joue toujours mieux que dans Plus Belle la vie ou Joséphine Ange Gardien ! Celle qui tire véritablement son épingle du jeu dans Marianne, c'est bien sûr Mireille Herbstmeyer, une actrice qui n'a besoin d'aucun effet de maquillage pour vous flanquer la pétoche et dieu sait qu'elle va vous la flanquer au cours des trois ou quatre premiers épisodes ! Terrifiante, c'est bel et bien le mot qui la désigne le mieux ! Les divers événements horrifiques qui auront lieu tout au long de la série ne font pas dans la dentelle et la vision des parents d'Emma, entièrement nus et couverts de scarification et d'insignes cabalistiques, marquent durablement l'esprit, tout comme la scène où cinq enfants se pendent au portique d'une balançoire. La série est interdite aux moins de 16 ans et elle l'assume totalement, ne faisant jamais de hors champ quand il s'agit de montrer de la nudité ou de la violence graphique. Autre point positif, les superbes décors naturels dans lesquels ont été filmé la série. La petite ville côtière, son port, son église, son phare, sa plage, sa mer et ses marées, ses habitations confèrent à donner un vrai cachet à la série et la photographie est de plus très soignée, nous proposant de superbes images, bien travaillées. Si le suspense et la tension sont palpables tout au long des huit épisodes, j'ai trouvé dommage qu'ils soient parfois désamorcés par des touches d'humour que je trouve inutiles et malvenues. J'aurai vraiment préféré que le réalisateur reste dans le sérieux et ne versent pas dans l'humour. A ce niveau, certaines répliques ou attitudes de l'inspecteur de police ne font vraiment pas crédibles, tout comme certaines réactions des personnages principaux. Des bémols, il y en a dans Marianne, c'est sûr, mais si cette première saison est loin d'être parfaite, si son scénario est parfois un brin décousu, on ne peut que la saluer pour ce qu'elle nous propose en visions horrifiques et c'est vraiment encourageant pour le futur. Si vous êtes fan de La Maison du Diable, de L'Exorciste, de Stephen King, d'Hérédité, de Insidious et j'en passe, n'hésitez pas à laisser sa chance à Marianne ! Une série française, oui, mais qui fait honneur au genre à laquelle elle appartient !

LES ÉPISODES :
1.1 - Tu les rêves
1.2 - C'est coutume !
1.3 - Je ne suis pas un cadeau
1.4 - C'est un beau moment
1.5 - Tu l'as laissée...
1.6 - Pour les souvenirs ?
1.7 - On était trop petit
1.8 - On est mardi

      

vendredi 13 septembre 2019

HURLER DE PEUR

HURLER DE PEUR
(Taste of Fear / Scream of Fear)

Réalisateur : Seth Holt
Année : 1961
Scénariste : Jimmy Sangster
Pays : Angleterre
Genre : Thriller
Interdiction : -12 ans
Avec : Susan Strasberg, Ann Todd, Ronald Lewis, Christopher Lee, Fred Johnson...


L'HISTOIRE : Penny Appleby, jeune femme paralysée et condamnée au fauteuil roulant, revient dans sa demeure familiale située sur la Côte d'Azur après la disparition de son père. Accueillie par Jane, sa belle-mère, et épaulée à chaque instant par Bob, le chauffeur de la famille, voici qu'elle commence à avoir d'épouvantables visions : elle se met à voir le cadavre de son père dans différents endroits de la demeure, lequel disparaît aussitôt…

MON AVIS : Il n'y a pas que de l'horreur à la Hammer, cette célèbre firme britannique qui a redoré le blason du cinéma d'épouvante en réactualisant les grands mythes (Dracula, Frankenstein, la Momie...) avec de superbes films en technicolor. Même si c'est évidemment dans ce registre que la Hammer a connu ses heures de gloire, la firme a aussi produit des films de guerre, des films d'aventure, des films policiers, des comédies, des films de science-fiction et aussi des thrillers, dont certains sont franchement très bons, à l'image de ce Hurler de Peur qui mérite toute notre attention ! Le film a été réalisé en 1961 par Seth Holt, réalisateur peu prolifique car décédé à l'âge de 48 ans. Pour la Hammer, il mettra également en scène Confession à un cadavre en 1965 et Blood from the Mummy's Tomb en 1971, année de sa mort. Si Seth Holt est bien le metteur en scène de Hurler de Peur, on peut tout de même dire que l'investigateur principal de ce projet est Jimmy Sangster, scénariste renommé qui eut un rôle à jouer capital à la Hammer à ce niveau, puisqu'il est responsable des histoires des meilleures productions de la firme. Il passera également derrière la caméra dès 1970 pour Les Horreurs de Frankenstein, Lust for a Vampire et Fear in the Night. C'est donc en 1961 qu'il rédige l'histoire machiavélique de Hurler de Peur. Une histoire qui lui tient vraiment à cœur et qu'il ne compte pas abandonner ou voir modifier lors de la phase de réalisation. Il va donc carrément demander à Michael Carreras, patron de la Hammer, d'être producteur du film, afin de garder un contrôle total sur ce dernier. Carreras accepte et le tournage débute sous la supervision de Sangster. Filmé principalement en décor naturel, en France (Villefranche, Antibes, Nice) mais également en studio pour quelques rares scènes en intérieur, Hurler de Peur a tout du suspense hitchcockien et il tire son épingle du jeu grâce au scénario riche en rebondissement de Jimmy Sangster, mais aussi de par son casting et sa superbe photographie en noir et blanc, due à Douglas Slocombe. L'héroïne du film, Penny Appleby, est interprétée par la ravissante Susan Strasberg, sorte de sosie de Natalie Wood, et qui livre ici une composition de très grande qualité, interprétant toutes sortes d'émotions, passant de la joie à la tristesse, du doute à la terreur de manière toute à fait crédible. Ses cris d'effroi justifie à eux seuls le titre du film ! La pauvre jeune femme, paraplégique suite à une chute de cheval, passe sa vie dans un fauteuil roulant et a souffert dans sa jeunesse de trouble psychologique, trouble qui pourrait expliquer les visions d'épouvante dont elle est témoin. C'est d'ailleurs ce que lui expliquera un curieux médecin, le docteur Pierre Gerrard, qui est joué par l'énigmatique Christopher Lee. Un petit rôle secondaire pour l'acteur vedette de la Hammer mais qui profite pleinement à l'intrigue du film. Car Penny se voit entouré de plusieurs personnes qui doute de ses propos et même de sa santé mentale, qu'ils jugent fragile. Sa belle-mère (Ann Todd) semble particulièrement apprécier le docteur Gerrard et on se demande si elle est aussi gentille et attentionnée qu'elle le paraît ou si ce n'est qu'un jeu d’apparence. Bob, le chauffeur de la famille (Ronald Lewis), sera le seul qui tentera d'aider Penny, succombant aux charmes de la jeune femme, et on le comprend. Tout l'intérêt du film est alors de savoir si la jeune handicapée est réellement folle, si elle est en passe de le devenir ou si on essaye de lui faire croire qu'elle est folle ! Dans la même catégorie, on pense au sublime Hantise de George Cukor avec Ingrid Bergman et Charles Boyer. Les films ont en effet des points communs et si vous avez apprécié le film de 1944, vous apprécierez tout autant Hurler de Peur. La mise en scène de Seth Holt est raffinée, le noir et blanc sublime et le jeu sur les contrastes nous rappelle les plus belles œuvres de Val Lewton ! Esthétiquement et visuellement très réussi, Hurler de Peur développe son machiavélisme par petites touches, nous met sur de fausses pistes, nous mène en bateau avec brio, et parvient à maintenir la tension sur la durée, avec des tas de retournements de situation lors des vingt-dernières minutes qui nous donnent bien du plaisir. Vraiment un thriller exemplaire, efficace, qu'on rangera aisément à côté des Diaboliques de Clouzot ou de Rebecca d'Hitchcock, tant il n'a pas à rougir face à ces deux concurrents.

* Disponible en Médiabook DVD + BR + LIVRET chez ESC EDITIONS
Bonus :
- Présentation de la Hammer
- Analyse du film par Laurent Aknin




jeudi 12 septembre 2019

LES RÉVOLTÉS DE L'AN 2000

LES RÉVOLTÉS DE L'AN 2000
(¿ Quién puede matar a un niño ?)

Réalisateur : Narciso Ibáñez Serrador
Année : 1976
Scénariste : Narciso Ibáñez Serrador
Pays : Espagne, Angleterre, Allemagne
Genre : Drame, Thriller
Interdiction : -16 ans
Avec : Lewis Fiander, Prunella Ransome, Antonio Iranzo, Luis Ciges...


L'HISTOIRE : Tom et Evelyn, un couple de touristes anglais, visitent le sud de l'Espagne. Arrivés un matin sur la petite île tranquille d'Almanzora, ils découvrent le village déserté et s'étonnent de ne croiser que des enfants. Cherchant les habitants, ils découvrent bientôt l'effroyable vérité : les enfants éliminent tous les adultes de l'île. Traqué par ces meurtriers au visage d'ange, le couple va désespérément tenter de leur échapper...

MON AVIS : Passons rapidement sur la débilité du titre français, certainement trouvé par un esprit dérangé qui n'a pas du voir le film, pour nous intéresser à cette oeuvre de Narciso Ibáñez Serrador, réalisateur ibérique qui a principalement œuvré pour la télévision (épisodes de séries ou téléfilms) mais qui s'est également confronté au domaine du cinéma à deux reprises. Seulement à deux reprises pourrions-nous dire d'une voix emprunte de déception car les deux films qu'il a réalisé sont des petits bijoux comme on aimerait en voir plus souvent ! En 1969, Serrador nous offre La Résidence et en 1976, l'excellent Les Révoltés de l'An 2000, un film choc qui s'est vu censuré dans son pays d'origine à sa sortie puis qui a écopé d'une interdiction aux moins de 18 ans dans d'autres pays du monde, avant d'être acclamé par la critique et le public lors de ses diffusions dans des festivals de cinéma, dont le Festival International du Film Fantastique d'Avoriaz, où il reçu le prix de la Critique en 1977. Film choc car, vous l'aurez compris à la lecture du scénario, Les Révoltés de l'An 2000 traite d'un sujet tabou, à savoir les enfants et leurs comportements meurtriers. Le film s'ouvre sur des images d'archives perturbantes des guerres connues de tous : Seconde Guerre mondiale (Auschwitz), guerre de Corée, guerre d'Indochine, guerre du Vietnam entre autres et nous indique le nombre de morts approximatifs ainsi que le nombre d'enfants morts durant ces conflits. Le discours de Serrador est très clair : l'enfance est la première victime des conflits orchestrés par les adultes. Il en va de même pour les épidémies, les famines : ce sont les enfants qui trinquent en premier. L'idée du film est alors d'inverser les rôles : et si les enfants prenaient le pouvoir et se mettaient à tuer les adultes, à les exclure du monde ? Une idée horrible car qui y-a-t'il de plus terrifiant que de voir sa progéniture se retourner contre nous ? Dans pareil cas, sérions-nous capable, comme le demande le titre original du film, de tuer un enfant ? C'est donc sur cette base que Narciso Ibáñez Serrador va ciseler son film et peaufiner une ambiance délétère et anxiogène qui ne manquera pas de faire réfléchir et provoquer quelques remous dans le ventre du public. Bien sûr, des enfants meurtriers, on en a déjà vu : ceux du Village des Damnés en 1960 et sa suite Les Enfants des Damnés en 1963, ceux de Demain les Mômes en 1975, ceux de Sa Majesté des Mouches en 1963, la petite fille de La Mauvaise Graine en 1956 ou le frère jumeau de L'Autre en 1972 par exemple. Mais avec Les Révoltés de l'An 2000, Serrador va plus loin dans le concept et sa mise en scène augmente le malaise et la cruauté qui nous sont présentés ici. Si le film met un peu de temps à réellement démarrer, avec cette longue exposition nous présentant Tom (Lewis Fiander) et Evelyn (Prunella Ransome) se baladant  parmi la foule dans une ville d'Espagne, ce qui, il est vrai, n'a rien de bien excitant, une fois le couple débarqué sur l'île d'Almanzora, l'atmosphère devient angoissante et pesante et la violence insidieuse se met petit à petit en place, pour exploser lors de la séquence finale. La mise en scène de Serrador est vraiment maîtrisée et le réalisateur sait utiliser son cadre, son décor, toujours baigné par un soleil resplendissant, pour un faire une sorte de labyrinthe dans lequel vont se perdre ses deux personnages principaux. La menace n'étant pas le Minotaure ici mais bel et bien ces enfants au comportement curieux, au regard troublant. Habilement, Serrador les inclut par petite touche au récit, d'abord une petite fille qui vient toucher le ventre enceinte de l'héroïne, puis un jeune garçon qui revient de la pêche et s'enfuit quand le héros veut lui parler. L'absence totale d'adultes sur l'île participe à créer cette sensation de mal-être qui nous fait comprendre que quelque chose cloche dans ce lieu pourtant paradisiaque. Il suffit que la caméra filme un corps entendu et couvert de sang derrière un comptoir, corps que ne voit pas le héros qui se trouve dans une autre allée de la boutique, pour que nos sens se mettent en éveil et notre pensée à cogiter. La terrible séquence, pourtant filmée en hors-champ, dans laquelle une fillette s'empare de la canne d'un supposé vieillard et lui assène une horde de coups d'une violence rare, provoque aussitôt une accélération de nos battements cardiaques. On comprend l'inacceptable, l'inavouable. Et le titre original du film de se rappeler à nouveau à notre mémoire. Les charmantes petites têtes blondes, comme on aiment à les appeler, sont les monstres du film et ça, ça change tout. Voir de jeunes garçons tenter de déshabiller une femme qu'ils viennent de tuer, voir des gosses tenir bâton, serpe, couteau, faucille et autres armes dans leurs petites mains et, pire que tout, le voir s'en servir contre des adultes, c'est bien plus traumatisant et malaisant que de voir des zombies ou des loups-garous massacrer des gens. Serrador ne donne d'ailleurs jamais d'explication quant au comportement des enfants. Pourquoi agissent-ils ainsi ? Quel a été le déclencheur de leur folie meurtrière ? Aucune réponse n'est donné aux spectateurs. Une scène en particulier laisserait penser que certains enfants ont un "don", un "pouvoir" de contrôle mental qu'ils exercent sur les autres. Le roman qui a servi de base au scénario, écrit par Juan José Plans, possède cette explication (une poudre tombée du ciel aurait contaminé les enfants, idée qui sera reprise plus ou moins dans De Si Gentils Petits Monstres et son nuage radioactif en 1980) mais elle est totalement zappé dans le film de Serrador, ce qui augmente le potentiel inquiétant de l'oeuvre. Avec ses plans incongrus (le réalisateur place souvent sa caméra au niveau des pieds des protagonistes), son cadre idyllique et lumineux qui se veut une antithèse total au décor traditionnellement baigné dans la pénombre des films de terreur, son rythme posé, la cruauté de son propos et de ses images, ses jeunes acteurs totalement investit, ses séquences marquantes qui évitent toute surenchère et restent dans le domaine du réalisme, Les Révoltés de l'An 2000 est une oeuvre puissante, majeure, dont on retrouve les influences dans bien des films contemporains, à commencer par ceux de Guillermo del Toro par exemple...

* Disponible en DVD chez WILD SIDE VIDEO



mercredi 11 septembre 2019

BAD TASTE

BAD TASTE
(Bad Taste)

Réalisateur : Peter Jackson
Année : 1987
Scénariste : Peter Jackson, Tony Hiles, Ken Hammon
Pays : Nouvelle-Zélande
Genre : Gore
Interdiction : -12 ans
Avec : Terry Potter, Pete O'Herne, Craig Smith, Mike Minett, Peter Jackson...


L'HISTOIRE : Une petite ville côtière de Nouvelle-Zélande est le théâtre d'une invasion extraterrestre. Les aliens, sous apparence humaine, ont décidé d'utiliser les habitants comme viande de première qualité pour leur fast-food spatial. Heureusement, une bande de copains va tenter de les stopper par tout les moyens...

MON AVIS : Qu'il est étonnant le parcours de Peter Jackson ! Comme Sam Raimi, qui a suivi la même évolution de carrière, le jeune Peter, qui habite en Nouvelle-Zélande, dispose d'un talent inné pour la mise en scène, est passionné par la caméra et les effets-spéciaux depuis son plus jeune âge, a débuté par le cinéma d'horreur indépendant à très petit budget avant de se voir offrir des ponts d'or par les studios afin de réaliser des blockbusters ! Dès que ses parents ont eu un caméra 8mm, Peter Jackson s'est mis à réaliser des tas de petits courts métrages inventifs avec ses copains. Il s'achète ensuite une caméra Bolex 16mm et décide de transformer un de ses courts métrages en film. Il réunit des amis, qui seront tout aussi bien acteurs que techniciens, et pendant quatre longues années, il filme chaque week-end, avec parfois des pauses de cinq mois, ce qui deviendra Bad Taste. Gonflé en 35mm, Peter Jackson part proposer son film au marché du film à Cannes en 1988, sans grande conviction, et revient au pays ravi, le film ayant été acheté dans divers pays dont la France ! Bad Taste gagnera petit à petit ses galons de film gore culte à travers ses diverses diffusions dans des festivals (il récoltera le prix du Gore au festival du Rex) et va acquérir une horde de fans à travers le monde lors de son exploitation en VHS puis en DVD. Quand on voit la saga du Seigneur des Anneaux et qu'on se rappelle de Bad Taste, on peut vraiment dire que Peter Jackson est parti de loin, de très loin même. Car ce premier film possède un côté vraiment amateur, notamment dans le jeu des acteurs (tous des potes du réalisateur, qui ont juste voulu l'aider dans son projet et qui n'ont pas poursuivi dans la voie du cinéma ensuite pour la majorité). Mais derrière cet aspect amateur se cache bien d'autres choses qui font de Bad Taste une expérience peu ordinaire dans laquelle le système D est le maître-mot. Il suffit de regarder le making of du film pour se rendre compte du génie créatif de Peter Jackson ! Avec trois bouts de ficelles, des tubes d'acier, du bois, du latex et un max de débrouillardise, Jackson et ses amis ont construit une grue pour leur caméra, des rails pour les travelling, une steadycam de fortune mais qui fonctionne à merveille, des maquettes réalistes et surtout des effets spéciaux gores et de maquillage qui fonctionnent encore très bien aujourd'hui et qui sont réellement d'une ingéniosité à toute épreuve. On le sait, Peter Jackson voue un culte aux artisans des effets spéciaux et notamment à ceux qui utilisent la stop-motion, comme Willis O'Brien ou Ray Harryhausen. Il a puisé dans son imagination mais aussi dans les nombreux films qu'il a vu pour imaginer et concevoir le look de ses extraterrestres, leurs masques et prothèses animés par des câbles, les armes du film (toutes factices et bricolées mais c'est quasiment indétectable à l'écran !) et les effets gores bien sûr. Un talent fou au service d'une histoire d'invasion extraterrestre rigolote donc, dans laquelle un groupe de quatre personnes au service du gouvernement va devoir tout faire pour sauver le monde. Quatre héros qui vont bien nous faire rire à travers des péripéties souvent loufoques, déjantées et dans lesquelles l'humour noir côtoie un gore décomplexé qui n'hésite pas à verser dans le répugnant et le vomitif. Mais toujours dans la bonne humeur, ce qui permet à Bad Taste de marquer des points et d'amuser plus qu'il ne dégoûte en fin de compte, même si certaines scènes donnent parfois la nausée, comme cette dégustation de vomi d'un vert peu appétissant (la petite Regan MacNeil de L'Exorciste à là un sérieux concurrent !) mais qui semble tout à fait au goût d'un de nos quatre héros ! A se pisser dessus ! Explosions de cervelles, tête coupée, bras arraché, corps coupé en deux et j'en passe, Peter Jackson nous offre un véritable festival de gore festif qui font de Bad Taste, en 1988, le film le plus gore jamais fait. Une consécration qui sera pulvérisée en 1992 par le même Peter Jackson et son génial Braindead. En l'état, Bad Taste est un pur film récréatif, qui souffre tout de même d'une certaine répétitivité dans ses rebondissements, de scènes d'action réalisées avec les moyens du bord et qui, il faut bien le reconnaître, font un peu nanar, d'un rythme pas toujours enlevé mais comme déjà dit, c'est cet aspect "bricolage" qui fait tout le charme du film. Si vous n'avez jamais vu Bad Taste mais que vous connaissez la majorité des films de Peter Jackson, nul doute que vous allez avoir la mâchoire qui va se détacher devant le résultat. A noter que le réalisateur interprète deux personnages dans son propre film, celui de l'hilarant Derek et son bout de crâne qui tombe, et celui de Robert l'extraterrestre ! 



mardi 10 septembre 2019

L’ODYSSÉE SOUS LA MER

L’ODYSSÉE SOUS LA MER
(The Neptune Factor : An Undersea Odyssey)

Réalisateur : Daniel Petrie
Année : 1973
Scénariste : Jack DeWitt
Pays : Canada
Genre : Aventure, film catastrophe
Interdiction : /
Avec : Ben Gazzara, Walter Pidgeon, Ernest Borgnine, Yvette Mimieux...


L'HISTOIRE : Au fond de l'océan Atlantique, des scientifiques travaillent dans une station sous-marine, baptisée Ocean Lab II, afin de recueillir des données sur la faune et la flore mais également pour étudier les séismes afin de pouvoir prédire leur déclenchement. C'est lors d'une violente secousse sismique que le laboratoire est envoyé dans un gouffre sous-marin, avec à l'intérieur des scientifiques. Une mission de sauvetage est enclenchée mais impossible d'envoyer des plongeurs à cette profondeur. Heureusement, le commandant Adrian Blake dispose d'un petit submersible révolutionnaire, le Neptune... 

MON AVIS : Quelle affiche ! Quel visuel ! De quoi faire saliver le spectateur, émerveillé devant ce poisson géant et ces murènes agressives de taille surdimensionnée, prenant à partie le Neptune, module sous-marin destiné à l'exploration des profondeurs. Mais ne vous enflammez pas trop vite, car le résultat n'est pas forcément à la hauteur des attentes suscitées par cette superbe affiche. Pourtant, on ne peut pas dire que tous les moyens n'ont pas été mis à profit du film de Daniel Petrie, réalisateur spécialisé dans les séries-télévisées depuis les années 50, à qui l'on doit également des téléfilms comme Les Hurlements de la Forêt (1971) ou Le Loup de la Nuit (1972) par exemple. C'est également lui qui réalisera Cocoon, le Retour en 1988. C'est en 1973 qu'on lui propose de signer la mise en scène d'un film novateur, qui relève du jamais vu puisque l'action se déroulera au fond des océans, là où personne n'a encore été filmé : L'Odyssée de la Mer. C'est en ayant entre les mains un scénario de Jack DeWitt que le producteur Sandy Howard va arpenter les firmes cinématographiques pour obtenir l'argent nécessaire à la mise en chantier du projet. Et c'est le Canada qui va répondre présent à l'appel et de manière plutôt percutante, comme vous allez le constater, avec mise à disposition de 2000 animaux de mers importés de plus de 50 pays ; fourniture d'un vrai submersible d'une valeur de 7 millions de dollars ; fourniture d'une vraie station sous-marine de 18 tonnes ; mise à disposition de plusieurs photographes spécialisés dans la prise de vue sous-marine ; participation technique de plus de 40 consultants de l'armée canadienne, du Institut Océanographique de Bedford et du Royal Ontario Museum ; prêt de véritables navires de l'armée et d'un hélicoptère pour les scènes se déroulant au dessus de la mer et j'en passe ! A cela s'ajoute un casting d'acteurs chevronnés, tels Ben Gazzara, Walter PidgeonYvette Mimieux ou Ernest Borgnine entre autres. Toutes les conditions semblent réunies pour faire de L'Odyssée de la Mer un spectacle qui va briller de mille feux et qui va emmener le public dans un voyage promettant aventure et dépaysement. Le film emprunte autant au genre aventure qu'à celui du film catastrophe, avec cette mission de sauvetage d'une station subaquatique qui a chuté dans un gouffre sous-marin suite à un séisme. Malheureusement, les péripéties proposées ne sont que peu attractives et de surcroît assez répétitives. Qui plus est, le manque de rigueur du scénario vient amoindrir le propos : on nous répète à plusieurs reprises que cette mission de sauvetage est très dangereuse, du fait de la profondeur du gouffre sous-marin et du danger que représente la pression, ce qui nécessite un submersible possédant la capacité de supporter cette pression. Et devinez quoi ? Les hommes présents dans le Neptune, alors qu'ils sont à une profondeur de plus de 300 mètres, qu'est-ce qu'ils font ? Bah ils sortent du submersible et vont tranquillement nager, sans ressentir la moindre difficulté ou la moindre gène. Pas très sérieux tout ça ! Evidemment, cela permet au réalisateur de nous proposer de jolies séquences sous-marines mais quand même. Les rapports un peu tendus entre les membres de l'équipe du Neptune viennent apporter un peu de piquant au récit, le commandant du submersible ayant un caractère bien trempé et ne semblant pas être très partant pour risquer sa vie pour des personnes qu'il ne connaît pas. Interprété par Ben Gazzara, ce personnage alterne entre le machisme et le mec sympa, changeant de comportement un nombre incalculable de fois, ce qui fait qu'il en devient rapidement irritable pour le public. Heureusement, le sympathique Ernest Borgnine est là pour relever le niveau et sa bonne bouille emporte l'adhésion. Si la première heure du film jongle entre séquences filmées au dessus et en dessous de la mer, rendant le tout certes divertissant mais sans toutefois provoquer un enthousiasme sidérant, la dernière demi-heure se veut plus intéressante puisqu'on va enfin aller fricoter avec les abysses, ces zones situées à des profondeurs terrifiantes et qui possèdent une faune de créatures cauchemardesques qu'on n'a pas vraiment envie de croiser. On se dit qu'on va enfin découvrir les monstres présents sur l'affiche du film et que le spectacle va réellement décoller et susciter bien des émotions fortes. Raté sur toute la ligne ! Car pour créatures abyssales, on a seulement droit à une rascasse, à des poissons-chats, à de jolis poissons colorés, à un crabe, à une langouste, à un poisson pierre ou à des anguilles. L'astuce consistant ici à les filmer en très gros plan et à insérer une petite maquette du Neptune pour faire croire qu'ils sont de tailles gigantesques ! Quelle déception. Tout ça pour ça ! Certes, en 1973, L'Odyssée de la Mer était sûrement une production ambitieuse mais pour qui aiment admirer les fonds sous-marins, on préférera se retaper les films de Cousteau ou des documentaires sur le sujet. L'Odyssée de la Mer n'est pas déplaisant  mais l'affiche nous a vendu du rêve et à l'arrivée, on ne peut pas vraiment dire qu'on a eu ce à quoi on s'attendait.



lundi 9 septembre 2019

LA TRAQUE (1975)

LA TRAQUE
(La Traque)

Réalisateur : Serge Leroy
Année : 1975
Scénariste : André G. Brunelin, Serge Leroy
Pays : France
Genre : Drame
Interdiction : -12 ans
Avec : Mimsy Farmer, Jean-Luc Bideau, Michael Lonsdale, Michel Constantin...


L'HISTOIRE : Une jeune anglaise, Helen Wells, se retrouve perdue en pleine campagne française. Philippe Mansart, homme influent de la région, lui vient en aide et la conduit à son lieu de destination. Mansart est membre des notables du coin, qui se réunissent régulièrement pour une partie de chasse. Une traque au sanglier est d'ailleurs organisée par le groupe de chasseurs. En chemin, trois d'entre-eux croisent Helen, qui profite de son temps libre pour découvrir les environs. Face à la beauté de la jeune femme, les frères Danville perdent leur sang-froid et la violent. Quelques minutes après, l'un des frères revient sur les lieux du drame pour récupérer un fusil oublié. Helen est toujours là et tire à bout portant sur son agresseur. Face à la situation qui peut compromettre leur rang social, les notables décident de traquer Helen...

MON AVIS : Après avoir réalisé pas mal de petits documentaires dans les années 60, Serge Leroy se spécialise dans le cinéma policier et dramatique dans les années 70 et 80, avec des films comme Le Mataf, Les Passagers, Attention les Enfants regardent, Légitime Violence, L'Indic, Le 4ème Pouvoir ou Contrainte par Corps par exemple. En 1975, il réalise un drame rural assez sordide avec La Traque, qui ne connut malheureusement pas le succès à cause de son sujet polémique et de sa violence. Depuis, le film de Serge Leroy, au hasard de rares diffusions télévisées, est devenu un objet de convoitise, un film recherché car ses qualités ont su toucher les spectateurs et on ne compte plus le nombre de fois où il est cité dans les listes des titres les plus attendus en DVD ou BR. Il semblerait qu'un problème de droits bloque pour l'instant toute sortie sur support numérique. Heureusement, j'ai mon enregistrement TV de très bonne qualité sur DVD-R pour me faire patienter et c'est avec plaisir que j'ai donc revu cette chronique d'une mort annoncée dans laquelle figure un casting détonnant. On ne peut en oublier aucun tant chaque personnage a sa propre personnalité, qui sert admirablement bien le sujet de l'histoire. Un casting cinq étoiles, avec Jean-Luc Bideau, Mimsy Farmer, Jean-Pierre Marielle, Michel Constantin, Michel Lonsdale, Michel Robin, Paul CrauchetGérard Darrieu et Philippe Léotard, qui interprète respectivement Philippe Mansart, Helen Wells, Albert Danville, le capitaine Nimier, David Sutter, Chamond, Rollin, Maurois et Paul Danville. Huit hommes respectables, dont certains ont des vues en politique, qui ne s'apprécient pas plus que ça pour la plupart, mais qui vont devoir rester soudés, quitte à basculer dans le côté obscur, pour ne pas finir en prison ou voir sa réputation être ternie par l'acte répugnant qu'ont fait subir les frères Danville à une jeune femme, anglaise de passage dans cette petite région campagnarde. Un viol évidemment, filmé sans complaisance ni attardement par Serge Leroy, mais qui provoque un malaise certain chez le public. On aurait pu s'attendre à ce que le film bifurque vers le rape & revenge, surtout quand Helen tire sur le jeune Philippe Léotard, mais il n'en sera rien. Serge Leroy préfère fouiller la noirceur de l'âme humaine et envoyer les sept hommes restants à la poursuite de la victime, ce qui lui permet de mettre en avant la personnalité de chaque protagoniste et d'étoffer l'aspect psychologique de son histoire. Une histoire qui joue la carte du réalisme, tout comme la mise en scène d'ailleurs. On est à mille lieux des images chocs des films US, japonais ou italiens ici. Ce qui intéresse avant tout Serge Leroy, c'est de montrer que des hommes, qui ne sont en aucun cas des tueurs psychotiques (quoique, on parle de chasseurs, mais bon, ne rentrons pas dans ce débat...), peuvent devenir des salauds par simple intérêt personnel ou carriériste. Les différents traits de caractères des chasseurs (l'indécis, le violent, le peureux, le profiteur, le militaire, le frustré sexuel...) sont parfaitement retranscrits par l'interprétation des acteurs, qui finiront tous par devenir haïssables, même ceux qui prendront au départ la défense de la pauvre Helen, très bien jouée par la charmante Mimsy Farmer (4 Mouches de Velours GrisLe Parfum de la Dame en NoirFrissons d'horreur). Plus le film avance, plus on ressent également la charge que porte Serge Leroy sur les hommes de pouvoir, les notables, les puissants. Il n'épargne pas cette catégorie sociale, les transforme en lâche, et accumule le poids de cette lâcheté sur leurs épaules tout en nous faisant bien comprendre que malgré leurs actes, ces hommes peuvent être au-dessus de la loi, comme le stipulera l'un d'eux avec une phrase chargée de sens, "et dîtes vous bien que tout ce que nous dirons a de forte chance d'être crus. Nous ne sommes pas des gens facilement soupçonnables." Ce que prouvera la dernière scène du film d'ailleurs, d'un nihilisme totale. Si on pourrait reprocher au film d'être assez avare sur les rebondissements, la majorité de l'action se focalisant sur la longue traque d'Helen par les chasseurs, ce parti pris du refus de faire de son film un "spectacle" est justement ce qui en fait toute sa force et c'est cette sobriété qui le transforme en véritable drame dont personne ne ressort indemne. Et que dire sur le final de cette traque inhumaine, dans un décor rappelant les bayous des films de rednecks, avec une Mimsy Farmer hurlant des "help" traumatisants qui marquent les esprits ? Petit tour de force à la française, La Traque est vraiment à découvrir et il est dommage qu'on ne puisse toujours pas le faire dans son propre pays ! Ceux qui veulent le découvrir diront merci à Youtube, en attendant mieux, c'est à dire l'édition collector à venir chez Le Chat qui Fume...

dimanche 8 septembre 2019

HELLBOY (2019)

HELLBOY
(Hellboy)

Réalisateur : Neil Marshall
Année : 2019
Scénariste : Andrew Cosby
Pays : Etats-Unis, Angleterre, Bulgarie
Genre : Action, Fantastique
Interdiction : -12 ans
Avec : David Harbour, Milla Jovovitch, Ian McShane, Sasha Lane, Daniel Dae Kim...


L'HISTOIRE : En l'an 517 après J.C. le roi Arthur et Merlin parviennent à mettre hors d'état de nuire la puissante sorcière Nimue grâce à l'épée Excalibur. Les diverses parties du corps de Nimue sont cachées à travers la planète. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les nazis font surgir un bébé démon qui devait leur permettre de gagner la guerre. Ce dernier n'est pas éliminé et il est élevé par le professeur Broom, expert en paranormal et directeur du Bureau Paranormal Recherche et Défense. Au fil des ans, celui qu'on surnomme Hellboy est devenu l'un des meilleurs protecteurs de la Terre, éliminant les démons et autres monstres menaçant l'existence des humains. Un nouveau défi l'attend et il est de taille : il semblerait qu'un monstre soit en train de récupérer les parties du corps de Nimue afin de la faire revenir à la vie, ce qui ne manquerait pas de déclencher une terrible apocalypse. Il va être secondé dans sa tâche par le soldat Ben Daimio et par la médium Alice Monaghan...

MON AVIS : Le personnage culte de la bande-dessinée créée par Mike Mignola en 1994 a déjà été le héros de deux adaptations cinématographiques, dues à Guillermo del Toro : Hellboy en 2004 et Hellboy 2 - les Légions d'Or Maudites en 2008, toutes deux avec Ron Perlman dans le rôle de Hellboy. Deux films de grande qualité mais qui s'éloignaient tout de même de l'esprit des comics de Mike Mignola, ce dernier avait même été assez désappointé par le second film. Les fans attendent un hypothétique troisième volet réalisé par Guillermo del Toro depuis 2008, et en sont d'ailleurs toujours à l'attendre à l'heure ou je vous parle, soit en 2019. Néanmoins, ils peuvent désormais se consoler avec une nouvelle approche du personnage, nettement plus fidèle au héros du comic, avec la sortie de Hellboy version 2019, nouveau film du au talentueux Neil Marshall (Dog Soldiers, The Descent, Doomsday, Centurion, Game of Thrones entre autres). Point de troisième suite au menu donc mais un reboot, qui zappe donc totalement les deux films de Guillermo del Toro. En gros, et à titre de comparaison, ce Hellboy 2019 est à Hellboy 2004 ce que Kong : Skull Island est à King Kong : c'est une nouvelle approche, une nouvelle vision du personnage et de son univers, et il faut le prendre comme tel pour pleinement l'apprécier. Notons que Mike Mignola a fait partie de l'aventure de ce nouveau film et qu'il semble plus que satisfait de la direction qu'ont pris réalisateur, scénariste et producteurs, même si le tournage a été un peu chaotique apparemment et les relations entre Neil Marshall et les producteurs plutôt tendues. En tout cas, il clame dans les bonus que c'est bien son Hellboy qui est dans ce film, bien plus que dans ceux de del Toro. De quoi réjouir les fans de ce démon au grand cœur, qui, s'ils font preuve d'ouverture d'esprit et ne passent pas leur temps à comparer le travail accompli par ces deux réalisateurs si différents, ce qui est totalement inutile et non productif, prendront bien du plaisir à savourer ce Hellboy 2019, film injustement boudé par le public mais qui trouve des défenseurs, que ce soit dans la presse spécialisée ou parmi les cinéphiles de tout bord. Alors oui, on oublie la jolie romance entre Hellboy et  Liz Sherman, on oublie la superbe créature aquatique Abe Sapiens, on oublie Ron Perlman, on oublie tout et on se laisse porter par le tout aussi charismatique David Harbour (le shérif Jim Hopper dans Stranger Things), qui réussit l'exploit, inconcevable au départ, d'incarner un Hellboy réaliste et qui tient parfaitement la route ! Incroyable mais c'est comme ça ! L'acteur fait le job et remplit sa mission haut la main. Le maquillage du démon rouge aux yeux jaunes lui va à merveille et dès sa première apparition, on a déjà oublié Ron Perlman ! Dingue ! Après une séquence introductive en noir et blanc, dont seule la couleur rouge sera permise (une séquence que l'on peut voir en couleur dans les bonus), le film nous prend par la main et nous embarque dans une ambiance totalement en adéquation avec le style comic, avec une histoire qui part souvent en roue libre, nous déplace d'un endroit à un autre comme de multiples vignettes, mais qui parvient, au final, à retomber sur ses pattes. Hellboy se montre toujours doté d'un humour bon enfant, se la joue toujours adolescent rebelle ronchonneur, et affronte toujours des monstres divers et variés. Ces derniers sont assez nombreux ici et on a droit à un trio de géants, à un monstre à la tête de sanglier (Gruagach), à Baba Yaga (superbe), à un vampire ailé et j'en passe. Le budget du film ayant été nettement revu à la baisse par rapport aux films de del Toro, on note parfois des CGI un peu faibles (le jaguar) se mêlant à d'autres qui sont, quant à eux, sublimes. A ce titre, toute la séquence plongeant Hellboy dans l'univers de Baba Yaga est juste magnifique et nous fait penser à... del Toro et son fabuleux Labyrinthe de Pan. Il en est de même avec la vision d'un Hellboy devenu un véritable démon des Enfers, aux cornes extravagantes, portant une épée enflammée et chevauchant un dragon ailé pour mieux détruire l'humanité. Des images d'une réelle fulgurance visuelle, associées à un rythme énergique et même à quelques raffinement bien gores, le sang n'étant pas absent de cette nouvelle mouture, bien au contraire ! Corps déchiquetés, décapitation, viscères et éclaboussures sanglantes seront de la partie et participeront pleinement à l'aspect festif du film. Bien sûr, si le film s'avère franchement fun, il n'en oublie pas pour autant d'explorer la psychologie de ses personnages principaux et notamment de son héros aux cornes poncées. Car Hellboy est constamment tiraillé entre sa personnalité humaine et sa personnalité démoniaque, proclamant même à un moment du film qu'il y a sûrement d'autre alternative que la destruction systématique des monstres débarquant sur Terre et que ce serait bien aussi que ces derniers aient un lieu pour y vivre en toute quiétude. C'est d'ailleurs un peu le but de la grande méchante du film, à savoir la terrible Reine Rouge, jouée par Milla Jovovich. Son désir de vengeance est associé à son désir de voir les créatures infernales vivre librement sans avoir à se cacher sous terre. Et pour cela, il lui faut l'aide d'Hellboy. Alors oui, les ronchons vous diront que le développement des personnages n'est pas aussi abouti que dans les films précédents, ce n'est pas faux, mais pas de quoi crier au scandale non plus. Point intéressant, cette version 2019 va nous dévoiler les origines lointaines du personnage et nous en apprendre plus sur lui. On aura droit à sa naissance, avec une séquence encore plus respectueuse de la bande-dessinée que dans le film de 2004 et aussi à la révélation de certains mystères l'entourant. La jeune Sasha Lane, qui joue la médium Alice, est prometteuse et si suite il y a, on espère que son personnage sera plus approfondie, tout comme celui du soldat Ben Daimio (Daniel Dae Kim). Les nombreuses petites scènes cachées dans le générique de fin nous laissent espérer d'une séquelle et un personnage fort apprécié du public devrait d'ailleurs y faire son apparition (ou sa réapparition). Spectacle généreux et divertissant, Hellboy 2019 n'est en rien le film infâme décrit avec beaucoup de mauvaise foi par les admirateurs de del Toro. C'est juste un autre versant du personnage et de son univers que nous présente Neil Marshall. A vous d'y adhérer ou pas. Pour ma part, j'ai plutôt apprécié ce coté BD horrifico-fantastique qui sied pleinement aux aventures du plus célèbre démon cornu !

* Disponible en DVD et BR chez METROPOLITAN VIDEO

LE BR :
Image superbe et d'une belle précision, avec des pistes audio VF et VOSTF en DTS 7.1
Niveau bonus, on a droit à un making of de 70 minutes qui laisse la parole aux producteurs, acteurs et artisans des effets-spéciaux. Des scènes coupées et un module sur la prévisualisation sont également au programme.




jeudi 5 septembre 2019

LA POUPÉE DE SATAN

LA POUPÉE DE SATAN
(La Bambola di Satana)

Réalisateur : Ferruccio Casapinta, Francesco Attenni
Année : 1969
Scénariste : Ferruccio Casapinta, Giorgio Cristallini, Carlo M. Lori
Pays : Etats-Unis, Chine
Genre : Thriller, épouvante
Interdiction : -12 ans
Avec : Erna Schurer, Roland Carey, Aurora Bautista, Ettore Ribotta, Lucia Bomez...


L'HISTOIRE : A la mort de son oncle, Elizabeth Balljanon, accompagnée de Jack, son fiancé, journaliste, et d'un couple d'amis, se rend dans le sud de la France pour la lecture du testament. Unique héritière, Elizabeth se retrouve propriétaire du château des Balljanon et des terres environnantes. Mais une malédiction ancestrale semble planer sur la famille et, chaque nuit, la jeune femme est en proie à de terribles cauchemars dans lesquels un homme masqué la torture dans les catacombes…

MON AVIS : Une affiche et un titre original qui font penser à un film sataniste, avec cette jolie blonde suspendue en X derrière laquelle se tiennent des silhouettes drapées de noir façon secte. Un visuel choisi par l'éditeur Le Chat qui Fume qui, lui, nous fait plutôt penser à un giallo ou un krimi, avec la même blonde maintenue par un homme cagoulé et ganté. Mais dans quel registre se situe La Poupée de Satan, unique réalisation de Ferruccio Casapinta ? Plutôt dans la seconde catégorie en fait, puisqu'on est clairement en présence d'un film de machination, dans lequel il va falloir deviner quel rôle joue véritablement chaque personnages, qui semblent être ce qu'ils ne sont pas forcément. A cet aspect thriller s'ajoute tout de même une ambiance et des scènes dignes du cinéma d'épouvante gothique, qui font d'ailleurs tout l'intérêt de La Poupée de Satan, titre assez mensonger puisque de Satan, il n'en sera jamais question. Quant à la poupée, peut-être est-ce une métaphore caractérisant l'héroïne principale, à savoir la blondinette Erna Schurer, qu'on peut effectivement qualifier de ravissante poupée. Véritable fourre-tout, le film de Ferruccio Casapinta, qui n'aurait pas assuré toute la mise en scène mais se serait bien fait aider par le directeur de la photographie, Francesco Attenni, nous propose, dans le désordre : une histoire d'héritage ; un château ; un fantôme ; un laboratoire secret ; une héroïne en panique, unique héritière devenant la cible de quelques mystérieux comploteurs ; des protagonistes tous plus louches les uns que les autres ; un possible gisement d'uranium situé sous le château ; des visions d'épouvante qui plongent l'héroïne dans des terreurs nocturnes ; un homme mystérieux vêtu de noir, cagoulé et ganté ; un chien qui passe son temps à renifler la porte du cimetière ; un peu d'érotisme léger ; une gouvernante qui a un amant dont on ne connaît pas le visage ; une jolie peintre qui semble plus s'intéresser au château de l'héritière qu'aux paysages qu'elle dessine ; des jeunes qui aiment danser dans l'auberge du coin au son du juke-box et j'en passe. Comme on le voit, La Poupée de Satan brasse large, un peu comme si réalisateurs et scénaristes avaient eu l'idée de piocher les ingrédients à succès dans divers films pour mixer le tout et obtenir une sorte de film-somme à succès garanti. Bon, la recette n'a pas forcément fonctionné vu que le film de Ferruccio Casapinta est plutôt tombé dans l'oubli le plus total et n'est réellement connu que des amateurs de films bis italien, et encore ! Pourtant, ce drôle de cocktail n'est pas dénué de saveur, parfois pas toujours digeste il est vrai, mais l'amateur d'étrangeté filmique en aura pour son argent. Étrange est en effet un terme qui résume bien La Poupée de Satan, ne serait-ce que pour son incroyable générique d'introduction, qui fait défiler des tas d'images du film qui nous dévoilent tous les rebondissements à venir et ne se prive même pas de ne pas nous avertir que de nombreuses révélations sont incluses dans ce flot d'images ! Une aberration sur pellicule quand on y pense, je vous conseille d'ailleurs de zapper totalement ce générique sous peine de rendre la vision de La Poupée de Satan obsolète ! Je ne sais pas qui a eu cette idée mais il a fait très fort dans la débilité ! Avec sa mise en scène parfois approximative, ses enchaînements de séquence qui ne respectent pas toujours la continuité jour/nuit, ses péripéties tantôt d'une platitude exaspérante, tantôt délirantes et stimulantes, il est difficile de se positionner sur la vraie qualité du film. Nanar, film bis décomplexé, ovni cinématographique, les trois à la fois ? Toujours est-il que La Poupée de Satan nous réserve, entre deux morceaux de grand n'importe quoi, de jolis moments et qu'il possède bien souvent une magnifique photographie, ainsi qu'une partition musicale efficace et diversifiée, due à Franco Potenza. La blonde Erna Schurer fait un peu figure de potiche au début mais trouve ensuite sa place et s'en tire assez bien, tout comme la brune Lucia Bomez, gouvernante à l'apparence sévère et stricte avec ses lunettes et sa tenue vestimentaire. Roland Carey, qui interprète le fiancé de l'héritière, fait aussi partie des acteurs qui s'en sortent bien niveau prestation et qui en fait profiter au film. Un casting assez sympa au final, qui permet au film de faire fonctionner assez bien son aspect machination infernale. J'avoue même que certaines révélations de l'intrigue m'ont surprises et que je n'ai pas tout deviné, je me suis même trompé sur certains personnages qui étaient en fait tout l'inverse de ce que je pensais. Comme quoi, malgré ses défauts, La Poupée de Satan reste un divertissement pas inutile ! Et puis, rien que pour la révélation finale qui nous fait penser de suite à la fin d'un épisode de Scooby-Doo, le film mérite plus qu'un simple coup d'oeil !

* Disponible en combo DVD + BR chez LE CHAT QUI FUME

LE COMBO :
Rien à dire encore une fois, très joli digipack trois volets enfermé dans un beau fourreau cartonné. Le film est présenté uniquement en version originale italienne sous-titrée français (car inédit en France) et il bénéficie d'une qualité d'image remarquable, qui rend honneur à la belle photographie de Francesco Attenni. Niveau bonus, on trouve un entretien avec Francis Barbier qui revient sur le film ainsi que la piste musicale et sonore isolée. Encore un sans-faute donc pour un film qui ne méritait peut-être pas tant mais qui peut désormais être découvert par le plus grand nombre dans une qualité optimale.

lundi 2 septembre 2019

KONG : SKULL ISLAND

KONG : SKULL ISLAND
(Kong : Skull Island)

Réalisateur : Jordan Vogt-Roberts
Année : 2017
Scénariste : Dan Gilroy, Max Borenstein, Derek Connolly
Pays : Etats-Unis, Chine
Genre : Action, Fantastique, Aventure
Interdiction : /
Avec : Tom Hiddleston, Samuel L. Jackson, Brie Larson, John Goodman, John C. Reilly...


L'HISTOIRE : 1973. La guerre du Vietnam vient de prendre fin. Le colonel Preston Packard accepte une dernière mission pour lui et ses hommes avant de renvoyer ces derniers dans leur pays. Une mission apparemment simple : les militaires vont devoir héliporter un groupe de scientifiques, un expert en survie en milieu hostile et une photographe sur une île inconnue de tous, découverte grâce aux premières photos satellites. Le but premier est de faire un relevé topographique de l'île. Mais militaires et civiles sont loin de se douter que leur périple sur celle qu'on surnomme Skull Island va s'avérer aussi dangereux. Ils vont rapidement faire connaissance avec la faune qui règne sur l'île : des créatures monstrueuses et terrifiantes, dont Kong, un gorille gigantesque de 30 mètres de hauteur, et qui semble être le roi incontesté de Skull Island...

MON AVIS : "On oublie tout, on fait presque table rase de tout ce qui concerne Kong !" Voilà ce qu'à du se dire Jordan Vogt-Roberts, réalisateur de Kong : Skull Island. De sa première apparition en 1933 dans King Kong et Le Fils de Kong au remake de 1976 et sa suite de 1986 (King Kong et King Kong 2) réalisés par John Guillermin puis au remake de Peter Jackson de 2005 (King Kong), le gorille géant a souvent été le protagoniste de la même histoire, à savoir une variation de la Belle et la Bête, avec une romance larmoyante et tragique qui a fait de ce "monstre" un personnage emblématique du cinéma fantastique dans le cœur du public. Comme le reconnaît lui-même Jordan Vogt-Roberts, le film de Peter Jackson, et notamment sa version longue, a sublimé l'histoire originale imaginée par Merian C. Cooper et Edgar Wallace en 1933 et il ne sert plus à rien d'en faire une redite, tout ayant été dit, tout ayant été montré. Le réalisateur a donc décidé de s'orienter dans une direction totalement différente lorsqu'on lui a proposé un nouveau projet consacré à Kong. Exit l'émouvante romance entre une jeune femme et un gorille géant donc. A la place, et pour s'inscrire dans le Monsterverse voulu par la firme Legendary Pictures, qui nous a offert le Godzilla de Gareth Edwards en 2014, Jordan Vogt-Roberts puise donc dans le Kaiju-Eiga, ces films de monstres géants japonais, dont Kong a d'ailleurs été par deux fois l'un des héros. Kong : Skull Island n'est donc ni une suite, ni un préquel, ni un remake. C'est une nouvelle approche, une remise à plat, un reboot pour parler anglais. Une nouvelle aventure qui zappe tout ce qui a précédé et dont la réelle finalité est de nous présenter ce nouveau Kong avant de le voir affronter Godzilla, Mothra, King Gidorah et consorts dans les prochains films produits par Legendary Pictures. A ce titre, je vous conseille de rester jusqu'à la fin du générique pour une scène additionnelle ne laissant aucun doute sur les stars des affrontements futurs justement. Kong : Skull Island doit donc réinventer cette figure mythique et on ne peut pas dire que Jordan Vogt-Roberts y a été avec le dos de la cuillère ! 30 mètres de haut pour la nouvelle taille de Kong !! Rien que ça !! On oublie aussi les dinosaures classiques vus et revus dans le film de 1933 et ses remakes (exit les diplodocus, serpent géant, ptérodactyles et autres Tyrannosaures) et on fait place à de nouvelles créatures au dimension également revue à la hausse et qui sont réellement impressionnantes ! Phasme géant, buffle puissant, arachnide moitié animale, moitié végétale au design magnifique, pieuvre monstrueuse, oiseaux voraces et surtout, de terrifiants Skullcrawlers, au look franchement cauchemardesque, vont venir nous ébahir et nous en donner pour notre argent sur cette fameuse île de Skull Island, entièrement retravaillée, pour un dépaysement total et un plaisir visuel sublimé. Les paysages sont époustouflants et surtout très variés, et l'intégration des images de synthèses aux décors naturels de l'île d'Hawaï, de l'Australie ou du Vietnam est tout bonnement excellente. Prenant place à la fin de la guerre du Vietnam, le film nous plonge dans un univers façon Apocalypse Now du plus bel effet, avec militaires, hélicoptères d'époque et musique rock ultra connues (Black Sabbath, Jefferson Airplane, David Bowie, The StoogesCreedence Clearwater Revival et j'en passe au niveau des chansons présentes dans la bande-originale). On est vraiment dans une imagerie très 70's et le film mélange avec brio ambiance de films de guerre à celle des films d'aventure et d'exploration. Parmi le casting, on trouve un Samuel L. Jackson absolument divin en colonel revanchard ne supportant pas l'arrêt de la guerre et qui voit en Kong un nouvel ennemi, une nouvelle guerre à gagner ! L'expert en survie est joué par Tom Hiddleston (le Loki des films Marvel), l'un des scientifiques par l'excellent John Goodman et la jolie photographe est interprétée par Brie Larson, qui endossera deux ans plus tard le costume sexy de Captain Marvel. Un casting bien en place, assez charismatique, et qui remplit parfaitement sa fonction au sein des autres acteurs dont la plupart ne serviront au final que de repas aux monstruosités vivantes de l'île, si on excepte le drôle de personnage joué par le rigolo John C. Reilly., unique survivant de la Seconde Guerre mondiale et qui a réussit à rester en vie sur Skull Island depuis 1944 ! Bénéficiant d'effets-spéciaux absolument renversants, Kong : Skull Island fait la part belle à l'action titanesque et le roi de Skull Island n'a peut-être jamais été aussi fantasmatique que dans ce film. La texture de sa peau, de sa fourrure est d'un réalisme sidérant (on a encore progressé depuis le film de Peter Jackson) et comme déjà dit, sa taille de 30 mètres de haut en fait véritablement un dieu vivant, ce qu'il est en fait pour la faune, la flore et les habitants de Skull Island ! C'est grâce à lui que perdure la vie sur l'île, il fait office de régulateur, protège population et animaux contre les Skullcrawlers. Un dieu bon, écolo même, qui passe la plupart de ses journées à parcourir son île et à admirer les aurores boréales. Il faut juste ne pas venir troubler son havre de paix. La première attaque des militaires en hélicoptères par un Kong déchaîné nous venge de sa mort par des avions dans ses précédentes aventures. Ici, c'est Kong qui fait sa loi et c'est avec un plaisir certain qu'on le voit attraper, écraser et détruire les hélicoptères, simples moustiques qu'il balaye d'un revers de main ! Dans les bonus du Blu-Ray, le réalisateur explique que l'un des points cruciaux qu'il voulait absolument réussir, c'était au niveau de la notion de la perspective. Il voulait coûte que coûte que l'échelle gigantesque de Kong soit d'un réalisme total par rapport au reste des personnages, véhicules ou décors du film. Un logiciel spécial est venu aider les cameramans et le résultat est juste bluffant. Les combats entre Kong et les créatures de Skull Island sont eux aussi assez sensationnels, notamment le combat contre la pieuvre géante et surtout ceux contre les Skullcrawlers, qui renvoient aux oubliettes tous les Jurassic Parc existants. On appréciera d'ailleurs les petits clins d'oeil que fait Jordan Vogt-Roberts au film de 1933 lors de ces scènes de bagarre, impossible de ne pas les repérer si vous êtes fan de Kong. Alors oui, Kong : Skull Island ne verse aucunement dans l'émotion. Vous ne verserez pas de chaudes larmes ici et la seule touche émotionnelle interviendra quand le personnage joué par Brie Larson touche délicatement la joue de Kong. Une jolie scène, qui renvoie à la romance incluse dans les autres films mais qui ne sera pas traitée de la même manière et ne donnera pas lieu à une histoire d'amour. Quand Kong sauve Brie Larson de la noyade en la prenant dans sa main, on peut se dire que la scène de la caresse sur sa joue a provoqué son petit effet sur notre primate géant mais ça n'ira pas plus loin. Tant mieux après tout, autant innover et ne pas répéter ce qu'on a déjà vu. Totalement jouissif, avec des punchlines qu'on croiraient sortir des films d'action 80's, Kong : Skull Island est un spectacle grandiose, qui n'hésite pas à en faire trop, à y aller franco, à se montrer plus que généreux et c'est tout à son honneur. C'est un film sur Kong qu'il faut visionner en mettant de côté ses précédentes apparitions à l'écran. Dire que j'ai hâte de le retrouver dans Godzilla vs Kong en 2020 est un doux euphémisme !