LES LINCEULS
(The Shrouds)
Réalisateur : David Cronenberg
Année : 2024
Scénariste : David Cronenberg
Pays : Canada, France
Genre : Science-fiction, Drame
Interdiction : -12 ans
Avec : Vincent Cassel, Diane Kruger, Guy Pearce, Sandrine Holt...
L'HISTOIRE : Karsh, 50 ans, est un homme d’affaires renommé. Inconsolable depuis le décès de son épouse, il invente un système révolutionnaire et controversé, GraveTech, qui permet aux vivants de se connecter à leurs chers disparus dans leurs linceuls. Une nuit, plusieurs tombes, dont celle de sa femme, sont vandalisées. Karsh se met en quête des coupables...
MON AVIS : Regarder un film de David Cronenberg, c'est être sûr d'assister à une oeuvre atypique, dans laquelle le corps sera mis à l'honneur la plupart du temps. Une thématique qui tient à coeur l'auteur canadien depuis Frissons en 1975 et qui n'aura eu de cesse de se renouveler, à travers des films tels Rage (1977), Scanners (1981), Videodrome (1983), La Mouche (1986), Faux Semblants (1988) ou bien encore Crash (1996) entre autres. Et puis, à partir de 2005, David Cronenberg s'est mis à délaisser les univers fantastiques pour bifurquer vers les thrillers sombre et brutaux ou des films plus abordables, à l'image de A History of Violence (2005), Les Promesses de l'Ombre (2007), A Dangerous Method (2011), Cosmopolis (2012) ou Maps of the Stars par exemple. Il faudra attendre 2022 et Les Crimes du Futur pour retrouver le Cronenberg des débuts. J'avoue que j'ai un peu délaissé ce réalisateur à partir des années 2000, quand il a mis de côté le fantastique et le body horror. Les avis sur Les Linceuls, son dernier film en date, qu'il réalise à l'âge de 81 ans en 2024, n'étaient pas très enthousiastes pour la plupart. Bien m'en a pris d'avoir tenté l'expérience car j'ai beaucoup apprécié cette proposition. Il faut savoir que ce film est important pour le réalisateur car il l'a écrit après le décès de sa femme Carolyn Cronenberg en 2017, une mort qui l'a bouleversé et dont il ne s'est jamais véritablement remis. Conçu au départ comme une oeuvre de science-fiction mettant en avant le rapport entre les morts et les vivants, Les Linceuls est devenu un travail sur le deuil et la mémoire, et par la-même un exutoire à la tristesse infinie de David Cronenberg. Dire que le réalisateur parle de lui dans ce film est un euphémisme. Il suffit de voir le look de Vincent Cassel, qui devient ici un sosie de Cronenberg ! La ressemblance est frappante et ne laisse guère indifférente. Qui plus est, le corps redevient une thématique majeure du film, et notamment à travers cette invention qui permet aux vivants de voir, à travers un écran placé sur les pierres tombales des défunts, ces derniers à travers un linceul bardé d'éléctroniques. Les familles peuvent à loisir observer le cadavre de leur défunt, et ce, a tous les stades de décompositions, et en haute définition ! Ce qui pourrait paraître abject et ecoeurant devient ici poétique, et la preuve d'un amour sincère pour les disparus, qu'on peut donc accompagner encore plus loin dans le processus mortuaire. Le personnage de Karsh voue un amour sans faille à sa défunte épouse, Becca, et il en reste inconsolable. D'où cette invention technologique, lui permettant de rester en contact avec elle. Mais lorsque plusieurs tombes de son cimetière high-tech sont profanés, et que son logiciel est hacké, Karsh se lance dans une course contre le temps pour comprendre et démêler les tenants et aboutissants qui ont conduit à ces actions. Le film devient alors un thriller science-fictionnel moderne, où le deuil tient une place prépondérante. Le rythme du film reste assez contemplatif, il y a beaucoup de dialogues entre les personnages mais personnellement, je n'ai jamais trouvé ça ennuyeux. J'ai été happé par ce récit somme toute complexe, aux ramifications diverses, porté par un très bon Vincent Cassel mais aussi une Diane Kruger qui joue un triple-rôles et se donne à 100% dans ses différents personnage, dont celui d'une IA ! Comme déjà dit, le récit est parfois compliqué à suivre, notamment avec des séquences de souvenirs qui, pour le coup, portent assurément la marque Cronenbergienne, les transformations du corps de Diane Kruger suite aux affres du cancer et des diverses opérations qu'il subit, mettant assez mal à l'aise le spectateur. On essaye, comme Cassel, de démêler les rouages ayant entraîné ce sabotage du cimetière et le piratage de la technologie GraveTech et de comprendre à qui pourrait profiter ces actions néfastes : Russes ? Chinois ? On nous parle de réseaux mondiaux qui seraient connectés via les tombes et les linceuls technologiques inventés par le héros, avec des disgressions complotistes intéressantes. Et ce beau-frère expert en informatique qui semble avoir un peu de rancoeur envers Karsh, a-t-il quelque chose à voir avec tout ça ? Ou bien la soeur de la défunte, qui est son portrait craché ? Ou bien encore cette entrepreneuse asiatique, dont le mari est en train de mourir et qui souhaite parrainé un nouveau cimetière high-tech ? Autant de possibilités qui tiennent en haleine et maintiennent, pour ma part en tout cas, un intérêt constant. Et si la solution tenait en une phrase, celle prononcée par Karsh lui-même et que je ne dévoilerai pas ici ? A vous de voir ! En tout cas, la scène finale nous convainc d'un fait. Quand l'amour est éternel, la personne qui reste ne cherche qu'une chose : retrouver l'être perdue chez les autres car personne ne pourra jamais la remplacer. Les Linceuls, un film loin d'être mineur dans la filmographie de David Cronenberg !
* Disponible en DVD, BR et 4K chez PYRAMIDE VIDEO
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