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jeudi 12 septembre 2019

LES RÉVOLTÉS DE L'AN 2000

LES RÉVOLTÉS DE L'AN 2000
(¿ Quién puede matar a un niño ?)

Réalisateur : Narciso Ibáñez Serrador
Année : 1976
Scénariste : Narciso Ibáñez Serrador
Pays : Espagne, Angleterre, Allemagne
Genre : Drame, Thriller
Interdiction : -16 ans
Avec : Lewis Fiander, Prunella Ransome, Antonio Iranzo, Luis Ciges...


L'HISTOIRE : Tom et Evelyn, un couple de touristes anglais, visitent le sud de l'Espagne. Arrivés un matin sur la petite île tranquille d'Almanzora, ils découvrent le village déserté et s'étonnent de ne croiser que des enfants. Cherchant les habitants, ils découvrent bientôt l'effroyable vérité : les enfants éliminent tous les adultes de l'île. Traqué par ces meurtriers au visage d'ange, le couple va désespérément tenter de leur échapper...

MON AVIS : Passons rapidement sur la débilité du titre français, certainement trouvé par un esprit dérangé qui n'a pas du voir le film, pour nous intéresser à cette oeuvre de Narciso Ibáñez Serrador, réalisateur ibérique qui a principalement œuvré pour la télévision (épisodes de séries ou téléfilms) mais qui s'est également confronté au domaine du cinéma à deux reprises. Seulement à deux reprises pourrions-nous dire d'une voix emprunte de déception car les deux films qu'il a réalisé sont des petits bijoux comme on aimerait en voir plus souvent ! En 1969, Serrador nous offre La Résidence et en 1976, l'excellent Les Révoltés de l'An 2000, un film choc qui s'est vu censuré dans son pays d'origine à sa sortie puis qui a écopé d'une interdiction aux moins de 18 ans dans d'autres pays du monde, avant d'être acclamé par la critique et le public lors de ses diffusions dans des festivals de cinéma, dont le Festival International du Film Fantastique d'Avoriaz, où il reçu le prix de la Critique en 1977. Film choc car, vous l'aurez compris à la lecture du scénario, Les Révoltés de l'An 2000 traite d'un sujet tabou, à savoir les enfants et leurs comportements meurtriers. Le film s'ouvre sur des images d'archives perturbantes des guerres connues de tous : Seconde Guerre mondiale (Auschwitz), guerre de Corée, guerre d'Indochine, guerre du Vietnam entre autres et nous indique le nombre de morts approximatifs ainsi que le nombre d'enfants morts durant ces conflits. Le discours de Serrador est très clair : l'enfance est la première victime des conflits orchestrés par les adultes. Il en va de même pour les épidémies, les famines : ce sont les enfants qui trinquent en premier. L'idée du film est alors d'inverser les rôles : et si les enfants prenaient le pouvoir et se mettaient à tuer les adultes, à les exclure du monde ? Une idée horrible car qui y-a-t'il de plus terrifiant que de voir sa progéniture se retourner contre nous ? Dans pareil cas, sérions-nous capable, comme le demande le titre original du film, de tuer un enfant ? C'est donc sur cette base que Narciso Ibáñez Serrador va ciseler son film et peaufiner une ambiance délétère et anxiogène qui ne manquera pas de faire réfléchir et provoquer quelques remous dans le ventre du public. Bien sûr, des enfants meurtriers, on en a déjà vu : ceux du Village des Damnés en 1960 et sa suite Les Enfants des Damnés en 1963, ceux de Demain les Mômes en 1975, ceux de Sa Majesté des Mouches en 1963, la petite fille de La Mauvaise Graine en 1956 ou le frère jumeau de L'Autre en 1972 par exemple. Mais avec Les Révoltés de l'An 2000, Serrador va plus loin dans le concept et sa mise en scène augmente le malaise et la cruauté qui nous sont présentés ici. Si le film met un peu de temps à réellement démarrer, avec cette longue exposition nous présentant Tom (Lewis Fiander) et Evelyn (Prunella Ransome) se baladant  parmi la foule dans une ville d'Espagne, ce qui, il est vrai, n'a rien de bien excitant, une fois le couple débarqué sur l'île d'Almanzora, l'atmosphère devient angoissante et pesante et la violence insidieuse se met petit à petit en place, pour exploser lors de la séquence finale. La mise en scène de Serrador est vraiment maîtrisée et le réalisateur sait utiliser son cadre, son décor, toujours baigné par un soleil resplendissant, pour un faire une sorte de labyrinthe dans lequel vont se perdre ses deux personnages principaux. La menace n'étant pas le Minotaure ici mais bel et bien ces enfants au comportement curieux, au regard troublant. Habilement, Serrador les inclut par petite touche au récit, d'abord une petite fille qui vient toucher le ventre enceinte de l'héroïne, puis un jeune garçon qui revient de la pêche et s'enfuit quand le héros veut lui parler. L'absence totale d'adultes sur l'île participe à créer cette sensation de mal-être qui nous fait comprendre que quelque chose cloche dans ce lieu pourtant paradisiaque. Il suffit que la caméra filme un corps entendu et couvert de sang derrière un comptoir, corps que ne voit pas le héros qui se trouve dans une autre allée de la boutique, pour que nos sens se mettent en éveil et notre pensée à cogiter. La terrible séquence, pourtant filmée en hors-champ, dans laquelle une fillette s'empare de la canne d'un supposé vieillard et lui assène une horde de coups d'une violence rare, provoque aussitôt une accélération de nos battements cardiaques. On comprend l'inacceptable, l'inavouable. Et le titre original du film de se rappeler à nouveau à notre mémoire. Les charmantes petites têtes blondes, comme on aiment à les appeler, sont les monstres du film et ça, ça change tout. Voir de jeunes garçons tenter de déshabiller une femme qu'ils viennent de tuer, voir des gosses tenir bâton, serpe, couteau, faucille et autres armes dans leurs petites mains et, pire que tout, le voir s'en servir contre des adultes, c'est bien plus traumatisant et malaisant que de voir des zombies ou des loups-garous massacrer des gens. Serrador ne donne d'ailleurs jamais d'explication quant au comportement des enfants. Pourquoi agissent-ils ainsi ? Quel a été le déclencheur de leur folie meurtrière ? Aucune réponse n'est donné aux spectateurs. Une scène en particulier laisserait penser que certains enfants ont un "don", un "pouvoir" de contrôle mental qu'ils exercent sur les autres. Le roman qui a servi de base au scénario, écrit par Juan José Plans, possède cette explication (une poudre tombée du ciel aurait contaminé les enfants, idée qui sera reprise plus ou moins dans De Si Gentils Petits Monstres et son nuage radioactif en 1980) mais elle est totalement zappé dans le film de Serrador, ce qui augmente le potentiel inquiétant de l'oeuvre. Avec ses plans incongrus (le réalisateur place souvent sa caméra au niveau des pieds des protagonistes), son cadre idyllique et lumineux qui se veut une antithèse total au décor traditionnellement baigné dans la pénombre des films de terreur, son rythme posé, la cruauté de son propos et de ses images, ses jeunes acteurs totalement investit, ses séquences marquantes qui évitent toute surenchère et restent dans le domaine du réalisme, Les Révoltés de l'An 2000 est une oeuvre puissante, majeure, dont on retrouve les influences dans bien des films contemporains, à commencer par ceux de Guillermo del Toro par exemple...

* Disponible en DVD chez WILD SIDE VIDEO



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