LE DÉMON DE LA CHAIR
(The Strange Woman)
Réalisateur : Edgar G. Ulmer, Douglas Sirk
Année : 1946
Scénario : Herb Meadow
Pays : Etats-Unis
Genre : Drame, thriller, romance
Interdiction : /
Avec : Hedy Lamarr, George Sanders, Louis Hayward, Gene Lockhart, Hillary Brooke...
L'HISTOIRE : En 1820, en Nouvelle-Angleterre. Enfant, Jenny Hager essaie de noyer son compagnon de jeu, Ephraïm, sans y parvenir. Devenue adulte, elle épouse le père d'Ephraïm, un homme aussi âgé que fortuné. De retour dans la maison familiale, Ephraïm retombe sous le charme de Jenny. Celle-ci profite de la situation et fait languir le jeune amoureux, lui promettant de se donner à lui s'il se débarrasse de son père...
MON AVIS : Quel portrait de femme nous livre Edgar G. Ulmer, apparemment aidé par un Douglas Sirk non crédité au générique, avec cette adaptation du roman de Ben Ames Williams ! Le Démon de la Chair, c'est en effet le personnage de Jenny Hager, et quel personnage ! Dès son enfance, le petite fille est la parfaite incarnation du slogan mi-ange, mi-démon ! Si on lui donnerait le bon Dieu sans confession, avec sa bouille et son sourire d'ange, c'est bel et bien le démon qui se cache derrière ses traits si innocents ! La séquence introductive, avec une excellente petite actrice, Jo Ann Marlowe, pose d'emblée les bases, les fondements de ce qui deviendra une véritable femme fatale par la suite. Dès son plus jeune âge, Jenny Hager a compris qu'elle possédait un réel pouvoir d'attraction sur la gent masculine et ce pouvoir, elle sait s'en servir pour manipuler la foule et arriver à ses fins. Elle possède également une réelle part de méchanceté qu'elle parvient à dissimuler grâce à ses talents de comédienne, parvenant à berner les adultes, comme lorsqu'elle se fait passer pour l'héroïne qui a secouru le pauvre Ephraïm, jeune garçon ne sachant pas nager et qu'elle a volontairement poussé dans l'eau, appuyant même sur sa tête pour qu'il ne puisse remonter à la surface. Une sacrée peste que la petite Jenny Hager, qui a déjà de l'ambition dans la vie : devenir une vraie femme forte, et surtout se sortir de la médiocrité et devenir une femme riche et fortunée. Passée cette scène d'introduction, le film fait une ellipse temporelle et on retrouve la petite Jenny devenue une belle jeune femme, en la personnage de la sublime Hedy Lamarr, qui trouve ici un rôle à la mesure de son charme et de son talent. Tout au long du film, elle fera tout pour atteindre son but, quitte à écraser toute personne se mettant en travers de sa route et toujours en utilisant son don pour le faux-semblant. Chaque geste, chaque parole, chaque prise de décision, tout est mûrement réfléchi par la jeune femme, pour s'attirer à la fois l’estime de la population (la scène dans l'Eglise où elle est la première à faire un don d'argent important au curé, ce qui provoquera l'admiration des autres femmes présentes) mais surtout pour mener à bon port sa barque. Il n'y a rien qu'elle ne fasse sans qu'elle y gagne quelque chose. Une véritable femme fatale donc, avec tout le machiavélisme que requiert ce type de personnage. Car sous ses atours de drame et de romance, Le Démon de la Chair est également un pur film noir, en costumes certes, mais on y retrouve tous les éléments principaux, tels les trahisons, les manipulations et même le meurtre prémédité. Un véritable rôle de composition pour Hedy Lamarr qui s'en sort admirablement bien, tenant tout le film sur ses épaules, qui sont loin d'êtres frêles pour le coup ! On aimerait alerter les hommes qu'elle prend aux pièges dans ses filets, comme le vieux monsieur Poster (Gene Lockhart), qu'elle épouse juste pour son argent, comme le fils de ce dernier, Ephraïm (Louis Hayward), amoureux transit qu'elle va manipuler jusqu'à ce qu'il atteigne ses derniers retranchements, ou encore John Evered (George Sanders, toujours impeccable), son nouveau futur époux qui vit pourtant une relation avec sa meilleure amie, Meg Saladine (Hillary Brooke). Mais l'arrivisme de Jenny Hager est sans égal et la notion d'amitié n'a plus lieu d'être si cela sert ses sombres desseins. Mis en scène avec brio, filmé dans un somptueux noir et blanc, Le Démon de la Chair est vraiment un très beau film, qui a beaucoup de classe. Ce portrait d'une femme complexe et quelque peu torturée, séductrice et venimeuse, touchée par la grâce de son interprète principale, est digne d'intérêt.
* Disponible en DVD chez -> ARTUS FILMS <-
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