WEEK-END
(Week-end)
Réalisateur : Jean-Luc Godard
Année : 1967
Scénario : Jean-Luc Godard
Pays : France, Italie
Genre : Drame
Interdiction : -16 ans
Avec : Mireille Darc, Jean Yanne, Jean-Pierre Kalfon, Valérie Lagrange, Michèle Breton...
L'HISTOIRE : Roland et Corinne, un couple de petits bourgeois, partent en week-end afin d'aller chez la mère de Corinne pour la tuer, histoire de récupérer l'héritage. Pris dans d'interminables bouchons de la route, qui créent de multiples accidents, le couple va rencontrer une foule de personnages insolites et déconcertants et va se diriger droit vers une sorte de fin du monde apocalyptique, sans vraiment le réaliser...
MON AVIS : Dégoûté d'être devenu une sorte de star populaire à travers son mariage avec Anne Wiazemsky, Jean-Luc Godard va réaliser un de ses films les plus féroces avec Week-end, qui marque également la fin d'une époque pour le cinéaste. Le film est une virulente critique de ce que Godard appelle la civilisation des loisirs, et il prend en exemple les fameux départs en week-end qui créent tant d'incivilité et de tensions sur les routes de France. Il place ses deux personnages principaux, Roland et sa femme Corinne, interprétés respectivement par Jean Yanne et Mireille Darc, au milieu d'interminables bouchons, notamment lors d'un gigantesque travelling de plus de 300 mètres, filmé admirablement et qui est bardé d'humour noir, finissant sur un dramatique accident routier dont nos deux protagonistes n'ont que faire. La structure même de Week-end est assez étrange et on a souvent l'impression de ne pas comprendre où veut en venir le réalisateur de Pierrot le Fou. L'univers qu'il nous propose se veut surréaliste, détonnant et déconcertant, proposant toute une panoplie de personnages secondaires totalement atypiques qui vont croiser la route des deux personnages principaux. On a parfois l'impression de se retrouver dans une pièce de théâtre filmée, avec des personnages qui récitent des textes de divers auteurs ou d'autres qui se lancent dans des pamphlets politiques sur la condition des noirs ou des Algériens. La scène se déroulant à la ferme, avec un nouveau travelling d'une longueur surprenante, circulaire cette fois-ci, étonne autant quelle déstabilise. Plus le film avance, plus on perd le fil conducteur, tant est qu'il y en ait eu réellement un. Quand il demande des aides au CNC, Godard présente Week-end ainsi : "En suivant un couple de jeunes cadres modernes sur la route, je voudrais montrer toutes les perversions, tous les dérèglements qui résultent de la forme d’hystérie collective qui s’empare des Parisiens munis d’automobiles dès le vendredi soir. Tout humanisme est tout à coup sacrifié à la tyrannie du “Dieu loisir”. Le voyage, commencé en apothéose, finira en tragi-comédie". C'est effectivement bien le cas dans le film, où les automobilistes se comportent comme des brutes sans cervelle, et leur comportement n'est pas épargné par Godard qui filme avec voyeurisme les bagarres ou les nombreuses épaves d'automobiles qui parsèment le trajet du duo Yanne / Darc. Des épaves dans lesquelles de nombreux corps et cadavres s'entassent, sans que cela ne choque personne alentour. Le cinéaste pousse même l'ironie à son maximum quand Mireille Darc s'écrit avec véhémence "mon sac Hermès !!", sa seule préoccupation après l'accident qui met le feu à leur voiture. Satire féroce, le film s'enfonce dans un aspect plus politique vers la fin, avec le kidnapping des personnages principaux par les membres du Front de libération de Seine-et-Oise ! Le décor se veut aussi plus apocalyptique et on comprend que le monde est en train de courir à sa perte, que le comportement des gens les font régresser et retourner à un état de barbares. La fin de la civilisation est proche, en témoigne cette ultime séquence dans laquelle Mireille Darc dévore une côte de bœuf dans laquelle "il y a sûrement un peu de votre mari dedans" lui dit le cuisinier. Le retour à une société primitive et cannibale termine donc ce film très curieux, original et maîtrisé certes, mais qui est assez difficile à appréhender et dont on ne saisit pas tous les tenants et aboutissants. Avec sa structure déstructurée, ses nombreuses scènes non-sensiques, son approche résolument anarchiste, Week-end risque d'en laisser une paire sur le bas côté de la route. Un ovni dans le paysage du cinéma français assurément. Personnellement, je ne sais pas trop quoi en penser, j'ai ressenti un certain ennui dans l'ensemble, l'absence d'une vraie histoire n'aidant pas à entrer dans le récit. Des longueurs et des scènes étranges et réussies. Déconcertant est le terme qui lui convient le mieux je pense.
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