TOYS ARE NOT FOR CHILDREN
(Toys are not for Children)
Réalisateur : Stanley H. Brassloff
Année : 1972
Scénariste : Macs McAree
Pays : Etats-Unis
Genre : Drame
Interdiction : -16 ans
Avec : Marcia Forbes, Harlan Cary Poe, Evelyn Kingsley, Luis Arroyo, Fran Warren...
L'HISTOIRE : Vouant une passion hors norme envers son père depuis sa plus tendre enfance, Jamie Godard a du vivre sans lui après que sa mère l'ait mis dehors suite à ses nombreuses aventures avec des prostituées. La jeune fille, désormais âgée de vingt ans, s'est renfermée dans son monde à elle, continuant à s'amuser avec tous les jouets que son père lui a offert depuis sa naissance. Elle se marie avec son collègue de travail, Charlie Belmond, mais se refuse à lui, préférant rester enfant dans un corps de femme. Sa rencontre avec Pearl Valdi, une prostituée qu'a fréquenté son père, et Eddie, le mac de cette dernière, va radicalement changer le comportement de Jamie, au grand dam de Charlie, qui reste impuissant face à la situation...
MON AVIS : Je savais que les années 70 recèlent des petites perles d'exploitation movie ! En voici un de plus, qui mérite assurément d'être découvert ! Réalisé en 1972 par Stanley H. Brassloff, qui n'a que deux films à son actif en tant que metteur en scène, Toys are not for Children est un drame atypique, psychologique, qui nous plonge dans le trauma de Jamie Godard, la jeune héroïne du film, interprétée par Marcia Forbes, dont ce sera l'unique rôle en tant qu'actrice. Les jouets sont souvent des vecteurs fantasmatiques ou effrayants dans les films, leur rigidité, leur apparence même, offrant aux réalisateurs matière à créer le suspense ou l'effroi. Poupée vivante, clown au rictus inquiétant prenant vie, peluche s'animant pour terroriser l'entourage de son possesseur, le catalogue est vaste, depuis La Quatrième Dimension à Poltergeist, en passant par Magic, la saga Chucky, Teddy, Demonic Toys, la saga Puppet Master j'en passe. Dans Toys are not for Children, les jouets ne déclenchent aucun élément de nature fantastique. Ils restent inertes. Il n'ont pas de volonté propre. Ils n'ont pas d'âmes. Sauf par leur propriétaire. Car la petite Jamie y tient beaucoup, à ces jouets, qui lui ont été offert par sa papa d'amour. Un papa coureur de jupons, qui aimait bien passer du temps avec des prostituées, au détriment de sa femme. Et qui aimait bien passer du temps avec sa fille. Les images du film restent assez ambiguës quand à la nature réelle de leur relation, même si on ne peut s'empêcher d'imaginer qu'un lien plus sordide anime le père et la fille. Les courts flashback, nous montrant le père faire prendre son bain à la petite Jamie ou la couvrir de bisous sur la bouche, laisse planer un sentiment de doute, qui met mal à l'aise. Le possible inceste n'est jamais frontalement montré, et ce n'est pas explicitement montré. Il est possible que le père n'ait rien à se reprocher au final. En tout cas, on est en présence d'un complexe œdipien comme rarement vu au cinéma (ou complexe d'Electre au choix) et cette fascination de l’héroïne pour sa père confère au film un climat perturbant, malsain, déstabilisant. Femme-enfant dans un corps de femme, la névrose de Jamie va bien lui compliquer la vie, et surtout celle de son mari, Charlie (Harlan Cary Poe). Ce dernier va se retrouver complètement désemparé face à sa femme, qui refuse tout attouchement ou relation sexuelle, préférant dormir ou passer du temps avec ses jouets d'enfance, qu'elle a minutieusement conservé et rapporté dans leur nouvelle appartement. Cette apparente frigidité, cette vulnérabilité, cette peur du sexe participent à faire du personnage de Jamie un être des plus troublants. La scène d"introduction, qui nous la montre entièrement nue sur son lit et serrant dans ses bras une peluche, qu'elle fait glisser sur son corps en gémissant "papa" donne le ton. Glauque. Perturbant. Sa relation avec son mari Charlie est là aussi assez dérangeante. Après tout, ne l'a voit-il pas lui-même comme un objet, une poupée qu'il pourrait manipuler, un être inanimé dans lequel il a incarnait ses désirs ? Face aux refus de sa femme de se livrer pleinement au joie du sexe, il fait comme son père avant lui, il l'abandonne, préférant se rendre dans des discothèques pour rencontrer d'autres femmes plus ouvertes. Pourtant, il aime Jamie et tentera de la ramener dans le croit chemin. Car le chemin qu'emprunte Jamie est trouble, sinueux, tout comme l'est son esprit dérangé. Son unique préoccupation est de retrouver son père, la seule personne qui compte dans sa vie. Elle va rencontrer Pearl et Eddie, une prostituée et son mac, et voir en eux la possibilité de retrouver une trace de son père. Si Jamie se refuse à son mari, elle aura moins d'appréhension à devenir elle aussi une prostituée, appelant "papa" les hommes qu'elle va rencontrer au gré de ses passes. Le film évite le voyeurisme pervers ou la complaisance érotique, même si quelques vision du corps nu de Jamie nous seront proposées. Ne sombrant jamais dans le graveleux, du moins en terme d'images, le sujet l'étant, quant à lui, Toys are not for Children déconcerte aussi par ce choix du réalisateur de ne pas verser dans la sexploitation facile auquel le sujet pouvait facilement se prêter. Cela renforce encore plus son impact je trouve et son intérêt. Le fait pour Jamie de devenir prostituée peut s'expliquer par le fait que cette fois, elle n'est plus un objet, c'est elle qui prend les choses en main, qui fait naître le désir chez les autres et qui peut assouvir ses propres fantasmes et non l'inverse. La rencontre final avec son père, qu'elle a fini par retrouver grâce à Pearl, est une des scènes marquantes du film. Sans rien dévoiler, elle se montre choquante, malaisante, tout en jouant avec les apparences. Avec une très bonne mise en scène, avec de jolies couleurs, avec une reconstituions du monde de l'enfance adéquate, avec un casting qui joue bien et un travail sur la personnalité de Jamie fort bien amené, Toys are nor for Children est de ces films méconnus qui se doivent d'être remis en avant, tant il dénote des productions plus formatées qu'on a l'habitude de nous servir. C'est un drame obsédant, touchant, qui traite de manière originale un traumatisme qui provoque des questionnements, des interrogations. Une oeuvre vénéneuse, qui se montre bien moins grindhouse que prévu, ce qui peut expliquer sa mauvaise réception de la part de la critique et du public à l'époque de sa sortie.
* Disponible en BR chez -> ARROW VIDEO <-
Sujet tabou ... apparemment plutôt finement abordé ... très tentant .. merci pour la découverte
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